Bon, au début, c'est nul. Le héros landais de Dumontheuil, présenté comme authentique (mais on ne nous la fait plus depuis Cervantès) est pénible: Tartarin post-routard, il promène son t-shirt blanc dans l'Afrique sub-saharienne en tentant de concilier conscience malheureuse de l'héritage coloniale et fascination pour l'Afrique magique et heureuse. Je vois bien ce que l'auteur essaie de faire; je vois bien que, comme Chevillard dans Oreille Rouge, il tente de trouver une voie médiane entre les clichés occidentaux sur l'Afrique tout en s'en amusant.
Or, la première moitié de l'album (tout de même!) nous présente longuement ce principe sans qu'il se passe grand-chose. On se désennuie en appréciant le travail graphique qui, lui, dépasse aisément le problème "carte postale/bidonville" (pendant visuel des difficultés éthiques de mon premier paragraphe). Le récit oscille entre carnet de voyage (celui qu'on lit en sentant à chaque ligne qu'on n'a affaire qu'à une version très dégradée de l'expérience) et exotisme fadasse.
Dumontheuil s'oriente ensuite vers des histoires. Hélas pour les clichés, celles-c montrent 1) une beauté noire, pute céleste et 2) une affaire d'envoutement; mais pour le récit, c'est bien mieux: le héros pénible devient franchement quichottesque en se confrontant plus clairement 1) aux réalités misérables et 2) à son racisme plus ou moins conscient. La réflexion n'avance pas forcément (elle devient implicite, donc sujette à interprétations) mais cesse d'être lourde, et le tout devient amusant. L'action s'accélère (on attend le rythme de Big foot, disons) et devient excessive (un mort, de la fornication) jusqu'à quelques pages de paranoïa en fin d'album.
L'arrivée de Jean-Dextre de Cadillac marque donc la vraie réussite de l'album. Mais il faut se farcir tout ce qui précède, qui, avec quelques belles idées, est nul, ou, plus précisément, inutile.