Cursus Fin du Monde
6.6
Cursus Fin du Monde

BD (divers) de Robin Cousin (2020)

Cette BD signée Robin Cousin met en scène un groupe d’étudiantes et étudiants dans le domaine des sciences. Venus faire la fête (soirée costumée sur le thème de l’Apocalypse), ils ne se privent pas pour se charrier mutuellement, par exemple en soulignant la distinction entre sciences dures (qui permettent des expérimentations avec des variables physiques mesurables) et sciences molles (sciences humaines). Concrètement, ils aimeraient croire en l’avenir.


Leur jeune âge les incite à refuser la résignation vis-à-vis de la collapsologie (attention, il ne s’agit pas d’une science, mais d’un courant de pensée qui s’appuie sur les observations désastreuses des dernières décennies, pour annoncer l’effondrement de nos civilisations). Ils ont bien conscience que les choses vont mal (constat simple et compréhensible par tout un chacun : le capitalisme – pour faire simple – s’appuie sur des prévisions de croissance à l’infini, alors que nous vivons dans un monde aux ressources limitées), même s’ils peuvent s’amuser entre eux pour cette soirée festive. L’alcool lève les inhibitions et les discussions font monter une certaine exaltation. Ne pourrait-on pas prendre des mesures (comportementales) pour inverser le cours des événements et tenter de sauver le monde ? Pour cela, une mobilisation aussi large que possible permettrait de coordonner les bonnes volontés. Une idée est lancée : faire le tour de ce qui ne va pas pour lancer des actions pilotées par un collectif.


Science et Avenir


Autant dire que les soucis relevés sont nombreux et divers. À tel point qu’il serait grand temps d’initier des changements fondamentaux. Ce qui émerge, c’est que depuis trop longtemps, la croyance persiste que la science pourrait avoir réponse à tout. Or, même si, globalement, le niveau de vie s’est élevé depuis plusieurs siècles grâce aux progrès scientifiques, la situation actuelle est franchement inquiétante. Il s’avère que la science est liée au capitalisme et aux systèmes politiques. En gros, les décideurs s’activent pour conserver leur position dominante, ce qui peut mener à l’impasse.


Dessinateur et scientifique


Voilà une BD qui mérite largement la découverte, en dépit de ses quelques défauts. Parmi ceux-ci, le dessin déçoit par son aspect que je considère comme assez primaire. Il est un peu compensé par des couleurs qui retiennent l’attention, mais peut-être un peu vives. D’autre part, Robin Cousin propose ici une astucieuse présentation pédagogique de la situation actuelle, mais sans creuser aucun des nombreux points abordés. Il utilise habilement (sans risquer de décourager par des aspects trop théoriques, comme dans Le chercheur fantôme – 2013) ses connaissances scientifiques pour inciter à la réflexion et c’est déjà très bien. Mais sa façon d’utiliser le medium BD reste décevante. Ainsi, de nombreuses cases restent vierges de tout décor et le dessinateur se contente d’un format quasiment uniforme, avec trois bandes par planche (en tout, seules deux cases, une au début et une autre vers la fin, occupent deux tiers d’une planche). Ceci dit, il apporte une intéressante contribution au débat sur l’avenir de l’humanité en montrant des jeunes qui veulent encore y croire.


Peut-on y croire (question ouverte) ?


Une BD indépendante (format 22,6 x 13,0 cm pour 78 planches) qui se lit facilement et permet de faire un inventaire correct des problématiques actuelles concernant d’éventuelles causes de catastrophe menaçant notre avenir : dérégulation du climat, surconsommation, épuisement des ressources naturelles, ainsi que la position de la science dans nos sociétés. L’auteur laisse ses personnages sur une fin ouverte qui laisse un peu sur notre faim, car la bonne volonté risque fort de ne pas suffire pour inverser la tendance catastrophiste actuelle. Les protagonistes parviendront-ils à quelque chose de satisfaisant ? Une question à tendance philosophique, puisque l’inversion de la tendance dépend de tout un chacun. Si l’avenir de l’humanité est en jeu, il serait bon que cette humanité trouve les moyens de se mettre d’accord sur ce qu’il convient de faire ou non et passe à l’action au lieu de se contenter de résolutions vertueuses. À noter, pour conclure, que l’un des protagonistes affirme que sa crainte est que le réchauffement climatique, en provoquant la fonte du permafrost, libère un paléo-virus qui viendrait décimer l’humanité.


Critique parue initialement sur LeMagduCiné

Electron
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le 8 nov. 2020

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