Le récit d’un créateur d’histoires de super-héros peut-il être plus héroïque et plus porteur de valeurs importantes que sa propre création destinée à la jeunesse ? Ce comics apporte la réponse : oui.
Etant pas un franc habitué des comics, celui-ci m’avait intrigué dès le début pour sa forte originalité, le fait que ces personnages célébrissimes soient réduits à ce qu’ils sont, des modèles imaginaires restant tapis dans l’ombre et qui y restent. J’ai trouvé que l’histoire commençait pourtant mal sur cette optique : insister à fond sur l’isolement de l’enfant renfermé sur ses personnages, c’est quelque chose qui me dérange. C’est quelque chose que j’ai connu également à l’identique, mais tel que c’est retrancrit, cela relève davantage de l’apitoiement qu’un sentiment de revanche à l’avenir… Heureusement, dès qu’on arrive à l’ère adulte, le brio du scénario se déclenche. Les illustrations, rarement juste descriptives, sont des réelles dramatisations romantiques : le dessin du protagoniste se relevant après la fameuse agression, au travers de lunettes cassées, est saisissante. On nous raconte une descente aux Enfers à la portée de tous, proche des addictions accessibles à n’importe qui, tout à l’opposé de l’univers super-héroïque où les problèmes revêtent toujours d’un côté extraordinaire. Et c’est finalement le grand message du comics à ce sujet, si on tombe dans la vraie vie, personne d’autre que soi ne viendra nous sauver durablement (personnellement je conchie la notion d’héroïsme, alors ça me convient à merveille). L’œuvre impressionne par sa maturité et par son recul par rapport à la mythologie Batman. C’est haleté et nourris que nous refermons le livre, avec presque une hargne retrouvée. J’applaudis.