Le jeu des trônes
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le 19 août 2016
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BD franco-belge de Hubert Boulard (Hubert) et Bertrand Gatignol (2016)
Avec Demi-Sang, deuxième tome de Les Ogres-Dieux, Hubert et Bertrand Gatignol livrent une fresque sombre et captivante, où la grandeur côtoie la monstruosité et où les destins tragiques se dessinent à coups de plume et de crayon. Ce conte baroque, à mi-chemin entre fable cruelle et drame familial, nous plonge dans un univers où même les demi-sangs portent des cicatrices pleines d’histoires.
L’histoire s’articule autour de Yori, un "demi-sang", rejeton né du croisement entre un ogre et une humaine. Coincé entre deux mondes, ni tout à fait homme ni tout à fait monstre, Yori incarne la lutte pour la survie et la reconnaissance dans un univers qui semble le condamner d’avance. Son ascension dans la société des humains, marquée par des intrigues, des trahisons, et des choix douloureux, est un récit aussi fascinant que glaçant.
Le personnage de Yori est une réussite complexe : à la fois vulnérable et impitoyable, il force le respect autant qu’il suscite la crainte. Sa quête de pouvoir, loin d’être simplement motivée par l’ambition, est une lutte désespérée pour s’affirmer dans un monde qui le considère comme un monstre. Ce portrait nuancé, mêlant lumière et obscurité, donne à l’histoire une profondeur rare.
Visuellement, Bertrand Gatignol signe des planches d’une beauté saisissante. Le contraste entre les noirs profonds et les blancs éclatants crée une atmosphère oppressante, presque gothique, où chaque case semble sculptée dans la pierre. Les personnages, avec leurs traits anguleux et leurs regards chargés d’émotion, renforcent la dimension théâtrale du récit. Les décors, minutieusement détaillés, ajoutent une richesse visuelle qui sublime l’histoire.
Narrativement, Hubert tisse une intrigue magistrale, où les récits enchâssés et les mythes familiaux ajoutent une dimension épique à une trame déjà riche. L’écriture, ciselée et élégante, donne une voix unique à cet univers baroque, où chaque mot semble peser aussi lourd qu’un coup de poignard.
Le ton sombre et tragique de Demi-Sang ne laisse que peu de place à l’espoir, mais c’est précisément ce qui fait sa force. Ce récit cruel et sans concessions explore des thèmes universels – la lutte pour l’identité, la soif de pouvoir, le poids de l’héritage – avec une intensité rare. Les moments de violence, bien que brutaux, ne sont jamais gratuits, mais servent toujours à illustrer la dureté implacable de cet univers.
En résumé, Demi-Sang est une œuvre magistrale, où Hubert et Gatignol tissent un récit d’une rare intensité, à la fois tragique et magnifiquement illustré. Avec un héros complexe, une narration sophistiquée, et un visuel à couper le souffle, ce deuxième tome confirme que Les Ogres-Dieux est une saga à part, une fable aussi sombre que fascinante. Un livre qui gronde comme un ogre et résonne comme une tragédie antique.
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Créée
le 30 déc. 2024
Critique lue 3 fois
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