Un « doggy bag », dans la langue de Shakespeare,
est un contenant dans lequel on remplit les restes
de notre repas que l’on n’a pas ingurgité au
restaurant. Probablement rassasié après une orgie
de bouffe, le quidam peut donc à loisir ramener
chez lui un salmigondis de nourriture froide
a réchauffer au micro onde le lendemain.
Mais « doggy bags » est également une sorte de faux
journal ou se mêlent plusieurs séries d’histoires
courtes illustrées en BD. Pour l’état d’esprit,
regardez du côté de « Mutafukaz ». Les lecteurs
avertis se souviennent en effet de la folie de cette
œuvre : fusion improbable entre le cinéma
grindhouse des années 70, de mangas ultras violents
décomplexés et de lutteurs mexicains envoyés par le
Christ pour botter le cul du Malin. L’ensemble
prenait place dans un univers futuriste, ambiance
fin du monde dans des ghettos pourris de villes
américaine à la ramasse. 2 colocs : 1 livreur de
pizzas, l’autre au RSA, se mettaient ainsi en quête
de sauver un monde à l’agonie dans un déferlement
de violence gratuite profondément fun.
Cette dinguerie était pilotée par Run que l’on
retrouve à la charge
DoggyBags. Au programme donc : 3 histoires
courtes d’une trentaine de pages dans lesquelles un
crocodile géant dévore les âmes perdues dans les
égouts de Los Angeles, où un dingue poursuivi par
un dragon démoli une ville à coups de tank et où
des gamins flinguent des zombies dans un parc
d’attraction patriotique.
Adressé à un public averti, amateur d’humour noir
au cynisme assumé Doggy Bags s’inscrit dans une
tradition culturelle de série B ultra référentielle.
Tarantino pourrait en effet écrire les scénarios de
cette bande d’auteurs azimutés qui se plaisent à
détourner les codes et les non dits de la société
Américaine. On me rétorquera sans doute (et à
raison) que ce n’est pas la manière la plus
intelligente de faire, mais au moins, ça à le mérite
de défouler. Ne serait ce que pour cette course folle
d’un homme, scintillant de mille feux dans son
armure, aux prises avec quinze voitures de police à
ses trousses. On se surprend à être tenu en haleine
et l’on se délecte des développements fracassants
d’intrigues toutes plus folles les unes que les autres.
Les auteurs de Doggy Bags résument d’ailleurs
parfaitement leur démarche sur la couverture : «
112 pages tout en couleurs et sans aucune
concession ! ». Dont acte.
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