Elle s'appelait Tomoji de Jirō Taniguchi, c’est un peu comme admirer un magnifique tableau à l’aquarelle… sous une pluie battante. On sent tout le talent et la sensibilité de l’artiste, mais le tout finit par s’effacer avant de réellement s’imprimer dans notre mémoire. Une œuvre douce et contemplative, certes, mais qui manque de relief pour vraiment captiver.


Le récit suit la vie simple et paisible de Tomoji Uchida, une jeune fille vivant dans le Japon rural du début du XXe siècle. C’est une sorte de biographie romancée où le quotidien, les traditions, et les petits bonheurs de l’existence prennent le pas sur l’action ou le drame. Une balade bucolique où l’on entendrait presque le vent souffler dans les champs, si seulement on n’était pas trop occupé à chercher un peu de tension narrative.


Visuellement, Taniguchi reste fidèle à lui-même : les dessins sont sublimes, précis et empreints d’une délicatesse qui n’appartient qu’à lui. Chaque paysage, chaque détail, du kimono de Tomoji aux fleurs qui bordent les chemins, respire la sérénité. C’est beau, c’est apaisant… mais c’est aussi incroyablement lent. Le rythme est tellement contemplatif qu’il frôle parfois l’immobilisme.


Et c’est bien là le souci : si l’esthétique est irréprochable, l’histoire peine à susciter une vraie émotion. Tomoji est attachante, mais son parcours, bien que sincère, manque de moments forts ou de surprises. C’est une succession de scènes de la vie quotidienne, touchantes à leur manière, mais qui peinent à se démarquer ou à laisser une empreinte durable. On suit le fil de sa vie comme on suivrait une rivière tranquille, sans cascade pour réveiller l’attention.


Cependant, tout n’est pas à jeter (on parle de Taniguchi, après tout). L’œuvre parvient à capturer une époque et un mode de vie avec une rare authenticité. Les amateurs de récits contemplatifs trouveront dans Elle s'appelait Tomoji une sorte de havre de paix narratif, une pause bienvenue dans un monde souvent trop agité. Mais pour les autres, le manque de conflit ou de véritable enjeu risque de rendre la lecture un brin monotone.


En résumé : Elle s'appelait Tomoji est une ode poétique à la simplicité de la vie, magnifiquement dessinée mais trop légère sur le plan narratif. C’est un beau voyage pour ceux qui cherchent le calme et la contemplation, mais un chemin un peu trop linéaire pour ceux qui espéraient des émotions plus marquées. Une œuvre à savourer lentement… si vous avez le temps et la patience.

CinephageAiguise
6

Créée

le 29 nov. 2024

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