Déjà repérée avec Goupil ou face et La Fille dans l’écran avec Manon Desveaux, l’autrice Lou Lubie confirme avec Et à la fin, ils meurent qu’elle représente une des plus prometteuses plumes de la scène BD de ces dernières années.
Élevée sans magnétoscope mais avec beaucoup de livres, dont de contes, elle s’est étonnée une fois adulte de l’image erronée que pouvait avoir les contes dans l’esprit des gens. « Pour enfants », « sexistes », « cul-cul », et autres qualificatifs sont utilisés mais qui proviennent en fait du plus connu adaptateur de ce genre du XXe et XXIe siècle : la compagnie Disney qui a coupé tout ce qui dépassait.
Lou Lubie à travers plusieurs chapitres éclairants va ainsi révéler les « terribles secrets » des contes de fées, mais pour mieux en montrer toute la richesse. De leur définition, à leur composition, leur psychanalyse et bien d’autres sujets, le tout entrecoupés d’exemples mis en images. Des contes parfois plus surprenants et populaires en leur temps sont découverts, de même pour la redécouverte de versions antérieures ou alternatives que celles bien connues.
Lou Lubie rappelle ainsi leur origine orale ou leur création littéraire, repris et adaptés selon les opinions ou le public des adaptateurs. Une matière malléable et modifiable comme le montre les différents collecteurs du genre et ce qu’ils en ont fait. Si Charles Perrault en bon catholique les a repris en les moralisant pour les enfants l’italien Giambattista Basile en offrait des versions truculentes et adultes pour un public de cour tandis que les frères Grimm les adaptaient avec leur sensibilité protestante. Ces histoires ont vécu à travers le temps mais aussi les frontières, s’adaptant ainsi à de nouveaux auditeurs ou lecteurs.
Une matière riche, mouvante, à la charge symbolique évidente mais mal comprise par un public contemporain qui n’a plus les codes. Lou Lubie s’est documentée avec une gourmandise certaine, s’appuyant sur de multiples sources qu’il est possible de retrouver en conclusion pour aller ensuite plus loin (ce Baptiste Giambattista, il faut le découvrir). L’érudition n’est pas étouffante, bien au contraire, elle est même stimulante. Avec son texte parfois passionné ou ironique et surtout ses illustrations toutes en malices, Lou Lubie fait partager son amour des contes avec un talent certain. C’est évidemment piquant, à l’image de ces contes dont les fées ne sont pas si bienveillantes, dont on redécouvre toute la richesse.