Dans un monde où tout est recouvert de glace, la famine et le chaos règnent sur la Terre. Parmi les quelques humains qui tentent de survivre, certains sont dotés de pouvoir surnaturels. Agni et sa sœur, Luna, font partis de ces « élus » et possèdent la faculté de se régénérer. Agni utilise ce pouvoir pour nourrir les habitants de son village. Pourtant cela ne suffira pas à les préserver du terrible malheur qui va s’abattre sur eux... Agni sera le seul survivant du massacre qui a brûlé tous ses proches. Il part alors dans une quête effrénée pour assouvir sa soif de vengeance !
Si l'intrigue part sur des bases très classiques, du bien contre le mal, dès le premier tome l'oeuvre devient totalement antimanichéenne à tous points de vue. Tout d'abord ni Agni ni aucun personnage de la série n'est tout blanc tout noir. Le monde de Fure Punch est un monde en fin de vie où l'espoir ne subsiste qu'avec des cultes religieux inventés de toute pièces, ne sont que des espoirs inventés sur la comète juste pour ne pas sombrer dans la folie. Car à peine les bases sont elles posées, à peine nous parle-t-on de la violence des exploitants sur les exploités que déjà le manga vire de bord pour nous montrer que le culte de leur supériorité est basé sur un mensonge éhonté, qu'il n'y a en définitive pas d'ennemi à abattre, ni levier miraculeux capable de ramener la réalité à quelque chose de supportable. C'est même l'un des points les plus intéressants du manga, l'importance des faux semblants dans un monde qui n'a plus aucun espoir concret, c'est l'un des points qu'incarne le plus le personnage de Togawa, l'un des personnages les plus complexes et intéressants de Fire Punch
Le parallèle entre le cinéma et la religion peut paraître difficile voire bizarre de prime abord mais la corrélation se fait très aisément. En effet dans ce monde où le pire s'est déjà produit, le meilleur n'est plus possible c'est une certitude. L'espoir est propre à l'homme mais quand il est impossible à ce point d'espérer les gens ont besoin de beaux mensonges qui les fassent rêver mêmes si ceux ci ne sont que des fuites en avant. Car c'est de cela qu'il s'agit dans toute la série, du rôle que les gens nous donnent, la place que l"on s"attribue, le regard des autres sur nos actes, l’importance de l'homme de croire en quelque chose même si ce quelque chose n'a aucun sens.
Je crois que l'une des scènes qui illustre le plus mon propos et qui arrive suffisamment tôt pour ne pas spoiler tout le manga c'est un passage très fort où Agni libère les esclaves de leur servage et où ceux ci voient en lui un héros, une figure christique venue les libérer de leurs tourments et les autres le voient comme une figure satanique, un démon invincible venu mettre fin à leur civilisation. Tout est que question de perception dans ce manga, d'ailleurs plus on avance dans le manga plus les actions de tous les personnages (et principalement celles d'Agni) apparaissent pour ce qu'elles sont, ambiguës, souvent féroces et parfaitement cruelles. Je pense que Fire Punch fait partie de ces œuvres rares qui jouent sur la non hypocrisie et le réalisme le plus flagrant de ce qu'est l'être humain c'est à dire quelqu'un susceptible de faire des choix aussi bons que mauvais, qui peut être bon un jour et mauvais le lendemain dans la simple logique de son cheminement de pensées. D'ailleurs le manga joue avec les codes et les stéréotypes notamment avec la relation entre Togawa et Agni où Agni être surpuissant et invincible cherchera toujours l'aval de Togawa à travers du film qu'elle tournera sur lui, se demandant sans cesse s'il est "le méchant" "dieu" ou le "protagoniste central"
(je termine par un petit paragraphe susceptible de spoiler mais qui résume mon avis global. Donc à ne lire qu'avec des pincettes)
A travers des références nombreuses et parfois inattendues au cinéma et à la pop culture (par exemple giant shark vs giant octopus, je pensais limite être le seul à connaitre cet étron cinématographique) la série nous amène toujours sur des terrains imprévisibles, sur des réflexions qu'on avait pas vues venir auparavant. D'autant que tous les êtres humains présents sont à la fois victimes et bourreaux, entre le faux culte de Juda, le fanatisme de San capable de prendre toutes les formes, la vengeance de Agni tout sauf utile, les différents points sur les actes d'Agni, la manière dont Togawa est ligotée au passé et contrainte par la nature à ne jamais être celle qu'elle aurait voulue être oui, il y a coté tragique, schizophrène et complètement fou qui englobe l'histoire de ce manga pendant ces tomes courts mais intenses. On ne sait pas du tout où on va et j'ai bien compris à la lecture de certains avis que l'ambivalence des points de vue ne plairait pas à tous le monde notamment à ceux et celles qui auront lâché dès les 2 ou 4. D'autant que la fin part dans la surenchère de violence jusqu'à partir dans un final proche de The Fountain et Interstellar et ne plaira qu'à ceux qui se sont pleinement immergés dans l'oeuvre