Ne dit-on pas que la patience est la mère de toutes les vertus? Cette expression s’applique à merveille à la série « Sambre ». Cette année, cela fait 30 ans que « Plus ne m’est rien », le mythique premier épisode de la saga tragico-romantique créée par Yslaire et Balac, est sorti pour la première fois en librairie! Depuis lors, les nerfs des nombreux fans de Bernard et Julie, les amants maudits de « Sambre », ont été mis à rude épreuve puisque seuls 5 autres épisodes de la série-mère ont été publiés. Pour les faire patienter, l’éditeur a multiplié les séries dérivées, toutes scénarisées par Yslaire mais dessinées par d’autres auteurs sous le titre générique « La guerre des Sambre » (il s’agit notamment des chapitres intitulés « Hugo & Iris », « Werner & Charlotte » et « Maxime-Augustin & Constance »). Dorénavant, il faut donc toujours se référer à un arbre généalogique pour savoir où on se situe dans la série. Pour « Fleur de pavé », le nouvel album qui vient de sortir, les choses sont plus claires puisqu’il s’agit bel et bien du septième épisode de la série originelle. On peut même dire que sa parution constitue un petit événement puisqu’il s’agit bel et bien d’une BD scénarisée et dessinée par Yslaire en personne, ce qui n’était plus arrivé depuis 2011, avec la sortie de « La Mer vue du Purgatoire ». A noter que le quatrième de couverture annonce la sortie des tomes 8 et 9 pour l’automne 2017 et l’hiver 2018. Un calendrier qui, au vu du rythme de publication de la série, paraît vraiment très optimiste!
« Fleur de pavé » se concentre sur le destin de Bernard-Marie et Judith, les jumeaux nés des amours de Bernard et Julie. Ce qui, en soi, constitue déjà une première surprise puisqu’on pensait que Judith était morte à la naissance. L’histoire démarre en 1858. Les deux enfants grandissent chacun de leur côté, sans se douter de l’existence de l’autre. Bernard-Marie vit dans la maison familiale des Sambre, où il est élevé de manière autoritaire par sa tante aveugle. Toutes les nuits, il fait des cauchemars peuplés de personnages aux yeux rouges, ce qui lui fait comprendre que sa mère, que l’on croit disparue en mer, est toujours vivante. Quant à Judith, qui a une personnalité plutôt rebelle, elle est élevée dans un orphelinat misérable à Paris. On croit d’abord que tout va aller mieux pour elle, puisqu’elle est adoptée par un couple de bourgeois, mais à cause de son comportement et surtout de ses mauvaises fréquentations, elle se retrouve rapidement à vivre dans la rue. La petite fille aux yeux vairons (l’un rouge, l’autre brun) y découvre les joies de la vie de bohème, mais aussi les désillusions des bas-fonds… Que penser de ce nouvel épisode? Bien sûr, à force de tirer sur la corde, « Sambre » a perdu un peu de sa fraîcheur et de sa magie. Mais il suffit de quelques pages pour se rendre compte qu’Yslaire est resté un maître pour évoquer les destins tragiques et les âmes tourmentées. Au niveau du dessin aussi, cela reste extrêmement séduisant. Mention spéciale au personnage de Judith, qui a inspiré le titre de l’album. C’est elle qui vole la vedette dans cette histoire, Yslaire prenant manifestement beaucoup de plaisir à dresser le portrait d’une fille de rue pleine d’énergie, de malice et de soif de liberté… mais qui, comme tous les autres Sambre, ne va pas tarder à être rattrapée par la malédiction qui pèse sur sa famille. On n’échappe pas à son destin!
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