C'est un peu réticente que je me suis lancée dans l'œuvre. Reticente d'abord parce que le battage médiatique était tel que je me demandais s'il restait quelque chose à découvrir. Ensuite parce que le très grand format avec une couverture rigide ne me renvoyaient à aucune madeleine de Proust. Enfin, parce que j'ai été deroutée en voyant le graphisme BD, bien casé et propre (je m'attendais à des codes mangas).
Et là, je me lance. Je cherche des repères, cet Alcor inconnu, et Venusia méconnaissable. Pourquoi ? Je cherche ceux que je connais, je cherche l'ellipse qui m'amène jusqu'à mon époque. Je cherche Actarus et Goldorak. Finalement, je suis comme Alcor, Venusia et tous les japonais : nous a-t-il oublié ?
Et tout s'enchaîne. Encore un peu désarçonnée graphiquement par cet Actarus abattu, rongé de culpabilité et avachi, j'intègre vite les nouveaux repères et l'ellipse narrative prend tout son sens : que s'est il passé sur Euphor ? Va t il nous aider encore ou nous abandonner ?
Et c'est parti. L'histoire est captivante, le dessin et la couleur magnifiques, la réflexion individuelle et collective est subtile et d'actualité. La question migratoire d'une certaine façon est centrale mais sans clichés, ni jugement, ni morale. Tout le questionnement d'Actarus sur le sens de nos actes, la destruction injuste et brutale (symboliquement ça peut être la perte de quelqu'un, ou d'un emploi, devoir tout recommencer mais pourquoi?), ou les dilemmes éthiques (utiliser
les armes des ennemis ?), traversent ce Goldorak d'une manière intime et fine.
C'est une très belle œuvre.
La fin est peut-être mon seul bémol : un migrant oui, mais pas tout un peuple. Les autres meurent et ça règle ainsi toutes les questions politiques, génétiques, culturelles, etc. C'est ainsi que je le perçois. Je me trompe sûrement...