Toute l'année je me tiens bien sage pour avoir une chance de recevoir mon nouvel opus des aventures des pépés de l'Enfer à Noël. J'ai encore bien assuré cette année, et le tome 8 m'est tombé du ciel, dans une pluie de paillettes et d'accords divins à la harpe. Joie. Et même si sa lecture ne provoque plus des torrents de rire comme le premier épisode, qui m'avait prise par surprise, c'est encore un grand sourire béat aux lèvres que j'ai dévoré les dialogues au vitriol de ces vieux de la vieille aussi insupportables qu'attachants. Les mêmes d'extrême-droite donneraient envie d'appeler l'asile ou finiraient en prison, mais là, ce sont des gauchos généreux et foutraques, alors ça passe bien mieux que les sorties racistes rances de l'oncle Alphonse. Ici, il n'est question que d'atomes crochus ou pas, parce que leurs inimitiés sont aussi fortes que celles de certains poissonnier et forgeron d'un certain village gaulois. Mais là non plus, ça ne prête pas à des règlements de compte de miliciens : ils se vannent, se boudent, s'ignorent puis se tombent dans les bras, comme tout bon gaulois qui se respecte. Ils portent beau mais, dès qu'on gratte un peu le verni, on découvre une bonne couche de mauvaise foi et de pusillanimité, comme dans les films de Pagnol. C'est qu'ils fleurent bon le Soumaintrain, ces vieux fourneaux, et qu'ils savent faire amende honorable juste à temps, comme les sales garnements qu'ils sont. Bref, on adore se laisser exaspérer et attendrir par cette génération gâtée dont tous les traits caricaturaux nous rappellent immanquablement des papys de nos familles ou de nos villages. ici, une fois encore, ils tapent dans la malle aux souvenirs pour exhumer certains épisodes de leur passé dignes de la Guerre des boutons, et la madeleine de Proust fait merveille, bien entendu. Bon, ben, je vais être obligée d'être sage toute une année encore, en résumé.