« Qui suis-je ? Cette puissance… d’où vient-elle ? » Derrière ses allures de manga d’action trash, Gunnm raconte en fait une quête existentielle, celle d’une cyborg à la recherche de son identité dans un monde dévasté. Paru aux éditions Glénat en 1995, ce manga est l’un des tout premiers à avoir été importés dans l’Hexagone, avant de gagner le statut d’œuvre culte. Au point d’intéresser Hollywood, qui a décidé de l’adapter en film, avec un long-métrage produit par James Cameron et réalisé par Robert Rodriguez. Alita : Battle Angel –
Gunnm est un des mangas fondateurs de la culture manga en France. Le graphisme est riche, l'histoire est juste d'enfer. cette cyborg, ancienne guerrière amnésique trouvée dans une décharge et qui change les parties de son corps abîmées au combat en mode cyber punk pour une terra incognita unique et tellement variée fait parie de mes mangas préférés et je m'arrête à cette oeuvre sans m'avEnturer dans Gunnm Last Order plus superficiel et moins brillant.
Certains mangas de la même époque peuvent avoir graphiquement mal vieilli. A la relecture, Gunnm n’est pas daté. Le fait que l’héroïne soit un personnage fort et que la thématique de l’humanité soit aussi présente peut expliquer son succès.
Yukito Kishiro a gardé la maîtrise de sa série, il est le seul auteur à avoir travaillé dessus. Bien qu’il ait écrit d’autres mangas, c’est son œuvre phare, le projet de sa vie. Il revient toujours à “Gunnm”. On sent qu’il poursuit l’écriture de sa série parce qu’il l’aime et non parce qu’elle avait seulement du succès. »
Ce manga m’est parvenu alors que la culture geek était profondément dominée par les héros masculins. Gally a été l’une des premières héroïnes que j’ai rencontrées. Je n’avais pas l’impression qu’elle était sexualisée, elle avait des traits humains, c’était un personnage à plusieurs dimensions, que l’on voit évoluer tout au long de ses aventures. »
Au-delà du personnage, c’est la richesse de l’univers, la dimension philosophique du récit et la « critique sociale » qui transparaît dans les pages qui l’ont conquise. Dans Gunnm, le monde se sépare en deux : sur terre, une immense décharge à ciel ouvert où sont cantonnées les plus basses castes de la société, tandis qu’au-dessus d’eux, les riches de la ville suspendue de Zalem déversent leurs déchets.
Inspiré notamment par les films Mad Max et le travail de Yoshikazu Yasuhiko, un prodige de l’animation qui a notamment officié sur Mobile Suit Gundam côté design, Yukito Kishiro admet, dans une interview au magazine français Atom en novembre 2018, que « la perte d’un être cher et la reconstruction post-traumatique traversent toute [son] œuvre ». Car du moment où elle est trouvée dans la décharge par Daisuke Ito, sorte de père adoptif, Gally n’aura de cesse de se chercher, de progresser, aimer, pleurer les siens, pour finalement grandir et s’affranchir.
Et pourtant, malgré son succès en Occident, il se pourrait que Gunnm soit une œuvre incomprise. C’est en tout cas le postulat de Marc Attalah, professeur de littérature à l’université de Lausanne et directeur de la Maison d’Ailleurs, musée de la science-fiction à Yverdon-les-Bainsen, en Suisse :
« Pour comprendre “Gunnm”, tout un fond symbolique nous manque : l’histoire du Japon, notamment celle de l’après-guerre. L’auteur fait partie de la “génération Otomo”, du nom de l’auteur d’Akira. C’est une génération qui en a marre d’être toujours en lien avec l’histoire d’après-guerre du Japon, dont leurs aînés ne se défont pas. Eux n’ont pas vécu la guerre, ils veulent s’en distancier. C’est ce que montre “Gunnm” : Gally veut s’émanciper de ce bourbier. Il s’agit de créer un homme nouveau, qui va utiliser la technologie, l’hybridation technologique, à ces fins. »
Le rapport du lecteur à la technologie diffère lui aussi selon son origine géographique et sa culture. L’élément est pourtant central dans cette œuvre résolument cyberpunk, dans la droite lignée des romans de l’Américain William Gibson, qui a popularisé ce genre, celui des dystopies où la technologie envahit les corps et les esprits. « Le cyberpunk américain, c’est un genre littéraire. Au Japon, c’est un rapport au monde », distingue Marc Attalah, avant de développer sa pensée :
« En Europe et aux Etats-Unis, le cyberpunk est interprété comme la prise de conscience qu’il se passe quelque chose d’important avec les nouvelles technologies, et que cela va vite poser des problèmes. Mais pour la génération Otomo, le cyberpunk n’est pas le monde de demain : c’est celui dans lequel vivent déjà ces jeunes-là. A cette époque, la jeunesse japonaise est déjà hybridée avec son téléphone. »
Malgré cette incompréhension, « les lecteurs européens interprètent Gunnm avec leurs propres codes. Pour la jeunesse française des années 1990, ce manga fait écho à des thèmes sociaux très présents en France : le discours sur la Terre ravagée, la critique de la science à l’heure du clonage, l’humanité qui survit tant bien que mal, le pouvoir inaccessible… »
Gally finalement représente chaque adolescent dans ce monde froid et dur où la violence est de mise (cyberpunk) un monde divisé en deux un peu comme aujourd'hui ou même hier lors de la guerre froide. GUNNM représente la terra incognita Cyberpunk originel dans notre imaginaire car il transcende Pinochio, Terminator, Blade Runner, Akira , Star Wars et bien d'autre.