Geof Darrow : un des rares artistes à avoir eu l’estime de Moebius. Prix Will Eisner 1993 pour HardBoiled (équivalent des oscar de la BD) pour sa première parution aux US. Geof Darrow est le type d’artistes qui est d’avantage apprécié par ses pairs (Manola, Simonson, Miller) que par le public, à l’image d’un Frank Zappa en musique par exemple.
Déjà, voilà quelques faits qui classeront « sans suite » les quelques petites opinions publiées sur le site nous faisant savoir qu’ils n’apprécient pas le style graphique ou que celui-ci résumerait à lui seul cette BD. Ce statut est d’ailleurs confirmé par les éditions noir&blanc, grand format et sans lettrage qui sont toutes épuisées et hors de prix sur internet (meilleure édition pour apprécier les illustrations hors normes de l’auteur).
Voici pour l’objectivité, voici mon opinion : l’une des plus belles réussites graphiques des 30 dernières années nous venant des USA. Effectivement, c’est violent voir dérangeant mais qu’est ce que ça nettoie nos mirettes habituées au mièvre et à la médiocrité (la BD d’aujourd’hui étant devenue industrielle et formatée comme la fiction en général au cinéma et en série TV).
Quid de l’histoire ?
Frank Miller a écrit le scénario et l’a confié à Darrow qui a fait un peu ce qu’il voulait avec (on dit que même Miller était horrifié par l’accumulation de cadavres). Le point fort du scénario est sa simplicité/puissance d’évocation qui sait évoquer beaucoup de choses sans avoir à les expliciter (le dessin virtuose de Darrow s’en occupant).
On est ici très proche d’une nouvelle de Philip k Dick (tel souvenir à vendre qui a inspiré le film total recall) par la simplicité et la concision. Tout l’intérêt du scénario se déroule (hors plan) dans le cerveau artificiel du héros tiraillé entre sa fausse mémoire, ses sentiments, ses pulsions sexuelles et sa notion toute particulière de l’éthique professionnelle.
Une BD qui se savoure lentement et qui prend toute son ampleur à partir de la seconde lecture. Pour ma part, un chef d’œuvre !