Il y a bien longtemps maintenant, la série Donjon Zénith était laissée en suspens et en bien mauvaise posture !
Tout le Donjon, dont les caisses sont vides, était en exode, suite à l'invasion légale de Guillaume de la Cour !… Rien ne va à Vaucanson, où Herbert est sommé de préparer un coup d'état !…
Beaucoup de pain sur la planche donc, et pourtant, on a dit que Donjon, c'était fini ! Haut-septentrion et La fin du Donjon sont sortis, c'était la fin, et pour les péripéties de la période Zénith, c'était "tant pis".
Heureusement, les auteurs ont fini par changer d'avis ! Ils se sont remis à l'ouvrage !
Et voici donc Hors des remparts !
Alors, qu'est-ce que ça vaut ?
L'histoire reprend là où elle s'est arrêtée : Vaucanson, ça attendra un peu, quant au Donjon, un plan se prépare pour défaire l'ordre des pourvoyeurs exécutaires, ordre très puissant qui ne laisserait jamais le Gardien reprendre le Donjon.
L'album se laisse lire avec plaisir. On n'est plus habitués, je trouve, au format 48 pages : c'est très très court, ça doit être très dur de boucler des histoires en aussi peu de pages.
Je dois avouer d'ailleurs que j'ai trouvé ça très rapide et que j'ai eu du mal à assimiler certains points du récit.
A la fin de ma lecture, je me suis rendu compte que je n'avais pas saisi pourquoi Marvin intervenait de manière spectrale, quelle était sa mission, s'il avait réussi ou échoué, et quel impact il avait eu dans la défaite de l'ordre. Il a fallu que je relise une deuxième fois l'album, un peu plus concentré, pour que je me rende compte que tout était bien clair et expliqué, que tout était logique, et que la mission de Marvin était indispensable à la réussite de la mission globale.
L'album avance donc dans le récit, et en même temps, commence à raccrocher de plus en plus les wagons avec la période Crépuscule. En effet,
on s'attend à ce que l'univers devienne à l'avenir plus chaotique suite à la destruction de l'ordre des pourvoyeurs exécutaires, Herbert ambitionne de reprendre Vaucanson et semble de plus en plus attiré par une position de pouvoir, l'Entité noire apparaît dans le récit (même si c'est pour re-disparaître), et enfin, Marvin se fâche avec le Gardien et quitte le Donjon : c'est une vraie page qui se tourne…
Les premiers tomes de Donjon Zénith tissaient des récits simples et drôles, bâtis à la fois sur la référence à l'univers du jeu de rôle, et sur l'idée que le Donjon est au fond une simple entreprise, dont le Gardien est le patron, les monstres les employés et les aventuriers la clientèle.
C'était un univers rafraîchissant que servait parfaitement le dessin de Lewis Trondheim.
Donjon Zénith n'a pas perdu en qualité, mais s'est définitivement transformé : la complexification scénaristique, les enjeux narratifs à résoudre qui s'accumulent, l'évolution progressive vers Crépuscule, couvrent complètement les premiers traits caractéristiques de la série. Le dessin de Boulet accompagne bien ce changement de ton.
Bien sûr ça convient bien à cet autre aspect essentiel de Donjon : le temps passe et tout change, tout le temps.
Si on est nostalgique des débuts, on n'a plus qu'à se réfugier entre les niveaux 1 et 2 de Zénith, dans Donjon Parade… ou à relire les premiers tomes.
En somme, en fermant l'album, en dehors simplement d'avoir passé un bon moment, je suis partagé entre le sentiment de satisfaction de voir certaines situations se résoudre, et le récit avancer, et le sentiment un peu triste et inquiet de voir que le Donjon est est train de changer de façon irrémédiable, en particulier avec les trajectoires d'Herbert et Marvin dont on voit bien que le destin va se tracer de plus en plus en dehors du Donjon à partir de maintenant.