Gros toutou
Critique #1 : Fred - 9 bullesÇa commence avec l’étiquette d’une bouteille de whisky et Elvis version 70’s qui danse la gigue dans les rêves d’Alex et de César. Ça finit sur le King qui en boit une...
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le 22 août 2023
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Ça commence avec l’étiquette d’une bouteille de whisky et Elvis version 70’s qui danse la gigue dans les rêves d’Alex et de César. Ça finit sur le King qui en boit une lampée au goulot. Entre les deux, il y a ce clébard qui débarque sans que personne ne sache d’où il sort ni ce qu’il fout là. Deux losers vont mener une enquête improbable avec l’intention de refourguer ce chien surgi de nulle part.
Ça commence dans une salle de réunion. Un publiciste présente à son client le travail réalisé sur l’étiquette d’une bouteille de whisky. Celui-ci théâtralise son opinion et ses directives. Cette étiquette de Pale Horse ne doit pas seulement suggérer le terroir, elle doit évoquer l’ « (…) histoire avec un grand H (…) », la sensation « du chemin parcouru (…) », donner au consommateur l’impression« d’être toujours là (…) », comme « un survivant, Néandertal, les vikings ». Et puis il faut penser à « une citation sous la marque (…), un truc libre de droit (…) »...Du coup, « Je suis l’alpha et l’oméga, le principe et la fin ; celui qui a soif, moi je lui donnerai de la source de vie. Telle sera la part du vainqueur » - (Livre de l’Apocalypse 21 6-7), comme citation libre de droit, ça l’fait bien.
Cette bouteille, nous la retrouverons sur la fin du récit ; pas spécialement comme fil conducteur, sans doute plus comme quelque chose qui clôt une boucle, un cycle, une histoire.
Mais d’abord, sur une double page, Elvis danse de la façon qu’on lui connaît – et qui scandalisa l’Amérique puritaine en son temps -, fringué comme à Végas en 70. Nous apprendrons rapidement que c’est Dieu (himself) qui apparaît dans les rêves, d’abord d’Alexandre, puis dans ceux de César, sous cette forme-là. « Avant il ressemblait à Karl Marx, maintenant c’est le King ».
♫♪♫ You ain’t nothing but a hound dog / Cryin’ all the time / Well, you never caught a rabbit / And you ain’t no friend of mine ♪♫♪ (Elvis Presley, Hound Dog, 1956)
Un matin (ou peut-être est-ce un autre moment de la journée ? ce n’est pas spécifié), César est réveillé par un chien qui lui renifle les orteils. Pas par son chien, par un chien. Pas plus que le sien ce chien n’est, d’ailleurs, celui de son coloc’ - que nous ne verrons pas, du reste, autrement que enfoncé dans le canapé, comme lobotomisé, manette en mains et lunettes de réalité virtuelle sur les yeux - ce qui, nonobstant,ne l’empêche pas de tenir une conversation.
Bref ! César rejoint son pote Alexandre, également chômeur de son état. Tous deux se lancent à la recherche du propriétaire du clébard (dont pas plus eux, que vous, que moi, ne savons d’où il sort), parce qu’avec sa tronche, « (…) à la SPA ils vont le piquer direct ». Ceci va donner lieu à une enquête pas exactement conventionnelle...
Le choix délibéré d’un visuel sans concessions est une réussite totale. Le dessin de Pegon est particulier et profondément marqué, à la fois extrêmement graphique en même temps que « réaliste » ; les proportions sont respectées et le traité – que nous pourrions penser simple - fourmille de détails. L’encrage amène l’impression d’ombre et de lumière. Les couleurs sont appliquées en aplats ; il n’y a pas de dégradés ou de nuances. Le spectre chromatique donne une impression, une ambiance égale tout au long de ces (presque) 200 pages. C’est fort !
Le parti pris est aussi celui de nous raconter une histoire sinon complètement barrée, au moins rocambolesque, parfois rigolote et parfois tristounette. Ce qui est (en partie) dû à la qualité des dialogues, combinés aux expressions des personnages, ou simplement à l’attitude qu’ils adoptent. Ce sont ces dites attitudes, le burlesque des situations dans lesquelles se retrouvent César et Alex, ainsi que les non-dits qui donnent sa dimension à cet album. Pegon s’offre à plusieurs reprises dans cet ouvrage le luxe de successions de planches sans dialogue aucun, ou avec très peu de texte (=3 bulles / 13 planches). C’est fort-bis !
Il est dit sur la 4ème de couverture que Hound Dog est un mélange « entre Twin Peaks et Bukowski ». Comme j’ai pas mieux comme image, et ben... pas mieux !
Dans une France complètement fantasmée qui ressemble surtout à un état Etasunien, deux hommes fans d’Elvis Presley enquêtent sur la mort suspecte d’un dénommé Cortez, dont le toutou grassouillet et apathique a élu domicile chez l’un de ces deux détectives du dimanche.
La 4e de couverture tape bien comme il faut à côté de la cible en annonçant un univers entre Twin Peaks et Charles Bukowski : on en est loin, bien loin, de l’un comme de l’autre. S’il fallait trouver un parrain spirituel à « Hound Dog », il faudrait plutôt aller chercher du coté du cinéma des frères Coen, tant par le scénario à la fois banal et rocambolesque, que par les considérations sur les petites et grandes choses de la vie qu’échangent les deux compères. Le dessin de Nicolas Pegon est maitrisé de bout en bout, il donne un vrai ton à son récit. Pourtant je n’ai pas réussi à véritablement me prendre d’affection pour cette petite galerie de personnages (hormis le chien).
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le 22 août 2023
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