Il fallait que j'en parle partout

Certains penseront que le sujet de l'IVG n'est pas intéressant. C'est peut-être pour ne pas imaginer ce que ressentent leurs comparses. Dans ce roman graphique, l'autrice et dessinatrice traduit des émotions fines de son état psychologique autour de son expérience d'avortement.

Elle utilise un style graphique doux et épuré mais pourtant tangible et incarné.
Tout est crédible dans la première partie autobiographique. Le personnage de Aude est authentique et artiste. On s'y attache dès les premières pages, très drôles. L'identification au personnage central fonctionne du tonnerre pour moi bien que je n'aie jamais avorté. Pouvoir s'identifier change totalement l'expérience de lecture, c'est pour cela que j'apprécie en général mieux les autrices.

Certaines pages sans cases cassent le rythme par leur conception et nous plongent dans le ressenti de Aude. C'est toujours appréciable de rencontrer des effets de style et ceux-ci sont tantôt magnifiques tantôt horrifiques mais dans un but narratif.

Devoir parler à un médecin, se prendre des préjugés sexistes, porter la vie, vivre un deuil, avoir mal, devoir montrer son sexe au médecin et le laisser nous faire mal. Il y a tout pour en faire des récits intéressants. L'autrice a vraiment fait un travail admirable car elle a su doser tout cela et rendre l'histoire passionnante.

La deuxième partie relate le témoignage d'expérience d'un médecin homme engagé pour l'IVG. Le point de vue du soignant, son cheminement. C'est un sujet intéressant aussi puisque jamais abordé. Mais j'avoue avoir beaucoup plus aimé la première partie autobiographique de Aude, vive et émouvante sans intermédiaires.