Critique de J'assure: Les aventures de Jérôme Moucherot, Tome 4 par Galedix
Un humour totalement décalé. Chef d'oeuvre!
Par
le 11 nov. 2012
Comme le deuxième album de la série des aventures de Jérôme Moucherot, ce quatrième volet comporte plusieurs histoires indépendantes :
- Pâle reflet (5 planches)
- Retour à la genèse des origines du commencement de l’assurance (12 planches)
- Petite méditation sur les chambardements du chaos (2 planches)
- Le quantique des quantiques (3 planches)
- Contrat du troisième type (1 planche)
- Le rock du potager (3 planches)
- Les joyeuses fées de l’assurance (3 planches)
- Troubles circulatoires (5 planches)
- Le tigre du Bengale assure un max (2 planches)
- Petit verre dans un rêve d’eau (10 planches)
- La compagnie « Le rire assuré » (4 planches)
- Le millénaire à bout (4 planches)
Un peu comme pour Sus à l’imprévu l’album séduit moins que les numéros impairs comportant une seule histoire avec d’innombrables péripéties et détails improbables issus de l’imaginaire fécond de François Boucq. Les six histoires comportant un maximum de 3 planches relèvent essentiellement de l’anecdotique. Heureusement, l’album comporte deux histoires plus longues qui enrichissent avec bonheur la bibliographie du personnage, l’un des favoris de son dessinateur et scénariste. Cette fois il cite en début d’album Stéphane Deleurance et Karim Belkrouf pour leur aimable collaboration, sans qu’on sache exactement ce qu’on leur doit.
Dans cet album, l’imaginaire de François Boucq fait encore une fois merveille, pour propulser Jérôme Moucherot dans des aventures comme lui seul sait les mettre en images, avec un évident talent et un état d’esprit vraiment très personnel. Toujours aussi décidé et affichant une foi inébranlable dans sa capacité à rassurer (réassurer) celles et ceux qui craignent les hasards de l’imprévu, (le petit) Jérôme Moucherot affronte des périls tous plus improbables les uns que les autres, pour mettre sa famille à l’abri du besoin. En bon assureur, il se veut en mesure de tout couvrir. Pour cela, il peut aller au bout du monde partir à la recherche du Graal des assureurs : l’arbre mythique de l’assurance-vie éternelle ! Bien évidemment, Boucq en profite pour lui faire côtoyer des individus aux comportements plus que limite. La jubilation pour le lecteur (la lectrice) vient du fait que dans le monde de Jérôme Moucherot, les comportements les plus extrêmes sont banalisés. Plus rien ne semblant choquer ces personnages, le dessinateur nous invite à considérer notre monde avec un peu de recul. Si on peut rire de l’outrance de certaines situations de l’album, c’est parce qu’elles vont largement au-delà de ce qu’on accepterait dans la réalité. Mais, ne laissons-nous pas passer régulièrement des attitudes ou comportements incorrects, à force de petites lâchetés ?
Sinon, François Boucq s’amuse encore pas mal avec des références que beaucoup noteront en fonction de leurs connaissances personnelles. On note ainsi un clin d’œil à Gotlib, singé en méchant rédacteur en chef d’une revue (Fluide glacial) qui pratique l’humour d’une manière très personnelle, cynique. Les cinéphiles feront immanquablement le rapprochement avec Le Parrain, le film de Francis Ford Coppola. La première histoire emmène Jérôme Moucherot dans un délire qui reflète la capacité du dessinateur à nous propulser dans des univers parallèles. La deuxième histoire, pleine de péripéties, nous emmène au bout du monde et comporte des références à Moebius. Par certains aspects, elle rappelle un peu l’album précédent de la série. Dans les deux suivantes, Léonard de Vinci apparaît à nouveau dans son rôle de personnage récurent, la deuxième étant à mon avis, la plus amusante. Les deux histoires suivantes font sourire, sans plus, même si elles restent bien dans le ton des aventures de Jérôme Moucherot. Dans Troubles circulatoires Boucq trouve une variation pleine de détails rigolos, pour illustrer un thème qui l’obsède : les difficultés liées à la circulation automobile envahissante. Enfin, avec Petit verre dans un rêve d’eau Boucq rend un hommage très inspiré à Winsor McKay et Little Nemo in Slumberland. Occasion pour un petit jeu de mots aussi astucieux que référencé, en faisant du capitaine Nemo un des personnages de la dernière histoire.
Même si cet album est moins enthousiasmant que ceux de la série avec une histoire complète, François Boucq se montre à la hauteur du titre qu’il choisit sans le moindre complexe. Pas de doute, toujours aussi inspiré graphiquement, il illustre avec panache des scénarios qui enrichissent la série et, à l’image de son personnage, il peut affirmer tranquillement « J’assure » !
Critique initialement parue sur LeMagduCiné : https://www.lemagducine.fr/a-lire/bd-mangas/jassure-critique-bd-10027249/
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Créée
le 13 mai 2020
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