Des B.D. autobiographiques, c’est un genre désormais très pratiqué. Des biographies d’auteurs de B.D., c’est plus rare (rappelons les excellentes "Aventures d’Hergé" de Bocquet, Fromental et Stanislas). Celle-ci porte sur l’invraisemblable Jean-Charles Ninduab, plus connu (?) sous le nom de Charlie Schlingo, mort en 2005 à la veille de ses 50 ans.


Dans "La Véritable Histoire de Futuropolis", Florence Cestac avait déjà dessiné quelques cases savoureuses sur Schlingo, concluant qu’il faudrait lui consacrer un album. Jean Teulé, qui a connu lui aussi Schlingo (il fait d’ailleurs ici une apparition), l’a prise au mot et a écrit un scénario que Florence Cestac a mis en images. Le titre, lui, est un authentique aphorisme de Schlingo.
Comme on pouvait s’y attendre à la lecture de ses B.D. absurdes et décalées, dont les héros s’appellent Tamponn Destartinn, Kokot Desnougat ou Grossemeuhmeuh, où un camembert peut provoquer un douloureux cas de conscience et où est organisé le Congrès des Minables, la vie de Schlingo a été nourrie d’épisodes ahurissants. De galères et d’occasions sabordées, aussi. C’est à croire qu’une vilaine sorcière s’était penchée sur le berceau de Schlingo et y avait gerbé sans retenue - ce que faisait fréquemment Schlingo en société. Ça commence bien mal, en effet, avec la polio et une convalescence douloureuse, où la B.D. est déjà une échappatoire à la tristesse du quotidien. On croise moult personnalités, Cestac bien sûr, mais aussi Dionnet, Golo et Frank –représentants avec Schlingo de « La Ligne Crasse »-, La Méchanceté (l’affectueuse chienne de Schlingo !) ou encore l’inénarrable Professeur Choron. Excessif, l’auteur de "Josette de rechange" ou de "Patron, une cuite s’il vous plaît !" tentait d’exorciser son malaise profond dans la provocation, l’alcool ou même la castagne – le bonhomme avait acquis une solide musculature en marchant sur les mains !
Teulé et Cestac rendent attachant et même émouvant ce type pourtant alcoolique et souvent peu fiable, qui séquestre un junkie qui l’a arnaqué ou pisse par la fenêtre de son studio minuscule. Le style « gros nez » de Cestac colle parfaitement à cette chronique déjantée, soulignant son côté grotesque tout en allégeant le côté pathétique, et même tragique de cette vie qui se conclut par une mort tout aussi absurde et dérisoire ! Près de cent pages qui passent trop vite. Il ne reste plus qu’à se (re)plonger dans l’œuvre de Schlingo, plus ou moins disponible.
Drustan
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le 23 août 2021

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