"Chasseur blanc, cœur noir" s'inspire des préliminaires du tournage d' « African Queen » de John Huston et s'achève ironiquement lorsque John Wilson (Clint Eastwood), le réalisateur, lance enfin d'une voix à peine audible le mot magique : « Action ! ». Eastwood reprend ici le thème de l'échec, fondamental dans la filmographie d'Huston, et, plus qu'à « African Queen » et à l'odyssée éprouvante, apparemment perdue d'avance, des personnages d'Elizabeth Hepburn et d'Humphrey Bogart, c'est à un autre film d'Huston qu'on pense irrésistiblement : « Moby Dick ». Comme Achab, John Wilson (pseudo limpide) poursuit une quête absolue, aussi absurde que dangereuse, quitte à entraîner de force les autres avec lui.
Avec son masochisme bien connu, Eastwood incarne un personnage très ambigu : au départ séduisant par son côté frondeur et indépendant, Wilson apparaît peu à peu, sous le regard consterné de son ami le scénariste Peter Verrill (Jeff Fahey, perdu de vue depuis), comme un sale gosse, arrogant, capricieux et égoïste, enfermé dans le corps d'un homme déjà âgé, qui s'obstine à ne pas voir les conséquences de ses actes, jusqu'au drame final où, cette fois, il comprend trop tard qu'il est allé trop loin.
Intéressante faute d'être vraiment marquante, l'unique escapade d'Eastwood en terre africaine reste un film singulier dans son œuvre, comme « Breezy » ou « Minuit dans le jardin du bien et du mal », où le réalisateur se renouvelle tout en traitant son propre thème favori : la confrontation, souvent houleuse, de l'individu avec la communauté.