Ce récit d'un tournage au coeur des paysages grandioses d'Afrique est inspiré par un ouvrage consacré au tournage du film African Queen, un classique de John Huston avec Bogart. Clint Eastwood filme au Zimbabwe cette reconstitution d'ambiance du Congo belge des années 50, en s'offrant un rôle différent de ses héros granitiques habituels, et fait revivre avec malice un cinéaste génial plongé dans une quête obsessionnelle de chasse à l'éléphant. C'est un peu le courage et la virilité à la façon d'Hemingway.
Restant fidèle au tempérament iconoclaste et contradictoire de Huston, Clint l'incarne de façon déguisée sous le nom de John Wilson sans chercher à l'imiter. Imprévisible, impulsif, égocentrique, ambigu, séduisant mais irritant, tyrannique mais brillant, et ne se préoccupant pas des conséquences de ses actes, ce personnage très inspiré de Huston, est complexe, et là où ça devient intéressant, c'est que Clint à travers son franc-parler et son mépris des conventions, parle de lui-même, de l'acteur-réalisateur qu'il est devenu, avec le poids du cinéaste-producteur qu'il a déjà en 1990. Il suffit de voir cette tirade où il évoque sa carrière hollywoodienne pour se rendre compte que c'est un véritable règlement de comptes, un beau jeu de miroirs.
Clint ne cherche pas à excuser l'acte de son modèle, et au-dela du massacre d'animaux sauvages, il lui importe surtout de retracer l'itinéraire moral d'un homme, sa quête de l'impossible et sa prise de conscience sous l'enveloppe d'un film d'aventure à connotation trouble certes, mais toutefois agréable, et il s'entoure d'un joli casting avec des acteurs comme Jeff Fahey, George Dzundza, Marisa Berenson, Alun Armstrong ou Timothy Spall...