Mark Millar, c'est l'outrance. C'est toujours un peu trop. Sans doute parce que son lectorat aime ce côté sans limite, sans garde fou et toujours au bord du débordement. Quand on le force à déposer son travail sur le bureau du chef de chez Marvel pour validation, le monsieur doit se calmer et jouer avec un peu de retenue. On se retrouve alors avec du UItimates ou du Civil war. Et c'est bien. Par contre quand il est en roue libre, ça devient vite pénible. Pénible parce qu'outrancier. Ah bah tiens, on en revient au début...
Et dans le "Millar world", les limites n'existent plus, tous les méchants sont des ordures et les gentils se font systématiquement défoncer. "Parce que tu vois mec", (clope au coin de la bouche), "mon monde à moi, ma vision du monde des super-héros, c'est un monde réel, c'est notre monde, avec des gars en costumes qui croient pouvoir éviter les balles et les coups de batte, alors qu'en fait, tu vois, un coup de talon dans la mâchoire, ça peut tuer ou au mieux t'as la tronche de travers pendant un mois". Ouais, franchement, d'accord. Aucun problème Mark, t'as vraiment raison, un mix de notre monde et de ce monde fantasmé, c'est vraiment un univers qui serait fascinant à traiter. Bon pas original, mais intéressant.
Alors quand Kick-Ass se fait torturer, tabasser, la violence graphique sert à quoi ? traduire une idée ou suivre le principe initial ? Et puis la chronologie, ce serait sympa aussi de la respecter aussi, histoire qu'un gamin qui se fait amocher systématiquement, dès qu'il sort, retourne pas au bout de trois jours jouer les justiciers, hein. Et puis une gamine de dix ans, elle a beau être une ninja psychopathe, il n'empêche qu'un coup de marteau sur les joues, ça calme... Alors je sais, "licence artistique"... Donc on peut se permettre de raconter n'importe comment une histoire à partir du moment où il suit le propos décidé. Mais à partir de ce présupposé, on a surtout le droit à un comics violent graphiquement, donc juste racoleur, grossier mais dont l'histoire est loin d'être édifiante : les motivations de Big Daddy sont marrantes mais pourquoi avoir formalisé cela par une valise ? Hit Girl est rigolote mais on ne voit l'histoire que par le prisme de Kick-Ass qui ne semble rien avoir à dire, à traduire ou à penser. Et puis au final tout finit en eau de boudin, rien ne se conclut, tout reste un peu pourri... Ce qui donne l'impression d'avoir lu une histoire complètement inutile où tout le monde se fait défoncer pour rien, avec un personnage principal qui ne fait rien, qui est un gringalet dont on ne comprend même pas la survie...
Reste Romita Jr. On est dans le haut du panier de l'illustration des années 80 et 90. Le style est classique, très dynamique, très lisible, à la fois éclatant et clair mais toujours au plus près de la narration. On est quand même très loin d'un comics indispensable, très proche du style de Wanted avec du racoleur et très peu profond. Reste Hit Girl et le dessin qui élèvent grandement le propos et la qualité du titre qui peine quand même à faire autre chose que du grandiloquent ridicule et vulgaire.