Une réunion d'anciens élèves apparaît comme une bonne idée à première vue : on revoit des connaissances, on mange, boit, l'assurance de bons moments en perspective. C'est dans cette ambiance qui nous plonge le one-shot Kiriko de Shingo Honda (Ping Pong Dash !!, Hakaiju)... pour mieux nous en éloigner et nous conduire vers de l'horreur 100% pur jus.
Tout avait pourtant bien commencé : six anciens camarades se retrouvent dans leur ancien collège, abandonné et désaffecté. Chacun a reçu une jolie invitation. Les retrouvailles sont l’occasion d'échanger et de parler du passé, marqué par le suicide mystérieux d’une des leurs : Setsuko Okumura (Kiriko est le surnom de Setsuko).
Outre cette vieille histoire, assez rapidement, une question va surgir : qui a envoyé les invitations ? Personne, parmi les six présents, ne se reconnaît comme l’auteur de cette rencontre. Ajoutons des bruits suspects, des intempéries qui vont pousser notre club des six à rester dans le collège et quelques tensions dans les rapports entre personnages et le tour est joué : l’horreur peut s’abattre, et quelques vies s’arrêter.
Le manga est ainsi marqué par une dégradation. Dégradation qui va en s’accroissant et tout emporter sur son passage : dégradation du lieu, dégradation des paroles (au fur et à mesure que certaines rancœurs ressurgissent) et dégradation des personnages, notamment du côté du visage (lisse au départ, il finit par se couvrir au fur et à mesure que la peur, la colère... font leur apparition).
En cinq chapitres, Kiriko nous offre un huis clos horrifique structuré selon les codes du genre. L’œuvre se révèle méthodique dans la manière de procéder : pas de temps mort, une avancée constante et un dessin efficace pour capturer l’atmosphère et qui ne rechigne pas à montrer des passages gore et à jouer sur les peurs du lecteur. En parallèle, Shingo Honda nous interroge aussi à travers les personnages et leur propension à moduler leur discours pour donner une image positive d’eux-mêmes (ne pas perdre la face), enjoliver le passé dans des proportions variables. En même temps que leurs traits s’obscurcissent, leur personnalité aussi gagne en noirceur.
Au fil des pages l’illusion des premières pages vole en éclats. Que se passe-t-il dans ce collège ? Que s’est-il passé dans ce lieu ? Qu’est-il arrivé à Setsuko ? Son tueur est-il ici pour supprimer des témoins gênants ? Le manga répondra progressivement à ces questions en nous proposant une plongée dans l’horreur simple et efficace, à lire jusqu’à la dernière page. Avec Kiriko, vous n’oublierez plus de vérifier à l’avance qui a organisé votre fête des anciens élèves.
Version augmentée de cette critique à retrouver par ici.