Un roman graphique aussi épais attire forcément l'attention, a fortiori s'il est vu gratifié d'un Fauve d'or à Angoulême. Pourtant j'avoue avoir été soulagé de refermer ce bouquin et cette histoire ne m'a pas occupé l'esprit dans les jours qui ont suivi la lecture, comme c'est habituellement le cas des bons livres. Si Un accident de chasse est un roman graphique dense, il est surtout particulièrement lourd et indgeste. Aussi bien graphiquement, que scénaristiquement.
Tout cela est évidemment très subjectif, mais je trouve que le trait griffonné et le noir et blanc n'ont rien d'extraordinaires. Le dessin n'étant ni particulièrement intéressant, ni très éloquent ni totalement maîtrisé. Les personnages se ressemblent et s'avèrent finalement assez ternes. Aucune planche ne procure de véritable émotion esthétique (quelques exceptions sur la fin).
Du reste, le découpage en chapitre n'est pas très naturel et l'on devine que l'auteur s'y est plié pour tenter de mettre de l'ordre dans cette histoire confuse et bien trop longue par rapport à son intérêt narratif. Malgré quelques passages intéressants, l'ensemble est globalement prétentieux et artificiel. La navigation entre les différentes époques n'est pas très heureuse et rendue difficile par le dessin un peu confus. L'histoire n'est pas fondamentalement inintéressante, mais ressasse des thèmes convenus sans beaucoup d'originalité : relation père-fils, secret de famille, émotion intelectuelle vs émotion sensible, la révélation littéraire en milieu carcéral... Et ce parallèle tellement évident et appuyé entre L'Enfer de Dante et la prison... Tout cela ressemble à un mauvais conte de fée pour adulte. Et un compte de fée -désolé si je me répète- long et prentieux. Ces pages entières à retranscrire des passages ampoulés du roman du père ou de Dante auraient dû être caviardées par l'éditeur ou n'importe quel relecteur attentif.
En conclusion, ce roman graphique n'est pas fondamentalement mauvais, certains passages sont bien contés et certaines planches (notamment celle dépeignant les personnages en Enfer dans la dernière partie) retiennent l'attention. Mais dans l'ensemble, tout cela manque de maîtrise et de clarté. Une preuve supplémentaire qu'un Fauve d'or est finalement l'équivalent d'une médaille sur une bouteille de vin : on évite le pire, mais on ne trouve pas forcément le meilleur. Les aigreurs d'estomac pouvant varier selon ce que vous avez l'habitude de consommer.