Les cristaux, fenêtres sur l'invisible ?

Parmi les nouvelles séries qui arrivent cette année sur le marché français, difficile de passer à côté de L’Ère des Cristaux (Houseki No Kuni), de Haruko Ichikawa qui paraît chez Glénat. Une vidéo ne fera pas de mal pour se mettre en jambes avec ce manga éminemment singulier. L’aventure débute ici (sous-titres en français donc ne vous privez pas).


Pourquoi cette série est-elle singulière ? A mes yeux cela tient à différents éléments qui, combinés, produisent un manga original et, pour tout dire, attirant.


J’ai d’abord été interpellé par les couvertures. Elles brillent, comme si elles étaient parsemées de petits cristaux. De plus, les jaquettes des deux premiers tomes rassemblent les personnages que nous serons amenés à voir à l’intérieur du tome. Leur agencement, leur allure, la couleur des cheveux, le fait que la scène se poursuive sur toute la jaquette, la lumière… Je suis fan. C’est un premier contact agréable, qui permet de glisser vers un autre élément important.


Cet élément concerne le design des personnages, avec une apparence très « fil de fer ». Ils sont donc assez épurés, taillés jusqu’à ne retenir que l’essentiel, idem au niveau de leurs armes (un point qui contraste par rapport aux Séléniens). Phos et les autres sont fins, ont à peu près tous la même morphologie, mais cette similitude ne les rend pas identiques : les visages, chevelures et personnalités sont variées. Vous ne pourrez pas les confondre. Et si vous avez du mal à retenir les prénoms, rendez-vous au début du tome 2 avec un récapitulatif des personnages ! Elle n’est pas belle la vie ?


Ajoutons un élément central : Phos et les autres ne sont pas « humains » mais des êtres vivants minéraux : les gemmes qui ont évolué pour prendre cette allure finalement proches de la nôtre. Par conséquent leur métabolisme est particulier (plus ou moins dur…), ils ne « fonctionnent » pas comme nous mais pour autant échangent entre eux, se disputent et s’amusent, sont animés par divers sentiments, forment une société organisée et hiérarchisée… Si proches et pourtant si différents.


Le langage est aussi particulier. Comme il s’agit de minéraux vivants, le genre n’intervient pas ici. Il n’y a pas de garçon ou de fille, quand bien même le Maître pourrait sembler être un homme et le reste, des femmes. De ce fait, c’est le masculin qui est utilisé. Le registre de langue est aussi un élément qui interpelle. Ces deux éléments ont tendance à nous éloigner de ce à quoi l’on peut être habitué. Mais ce dépaysement n’est pas désagréable. Au contraire, cela fait du bien de parcourir de tels terrains. Des terrains (au sens propre cette fois) qui sont, à l'instar des personnages, eux aussi épurés mais, attention, épurés ne veut pas dire vides. Au contraire il y a une beauté qui en émane. Ce côté minimaliste de Haruko Ichikawa nous devient assez vite familier et ne nous gêne pas, on finit par y prendre goût.


L’intrigue qui se déploie fait alors naître une multitude de questions : que s’est-il passé pour que les humains disparaissent ? Qu’est-ce qui se joue dans la lutte, à première vue sans fin, entre les gemmes et les Séléniens ? Le maître est-il un despote bienveillant ? Phos nous racontera-t-il l’histoire oublié de ce monde ? Trouvera-t-il sa place ? Sans oublier toutes les questions qui apparaissent au fil des pages, des interactions plus ou moins houleuses en passant par les réflexions et pensées auxquelles nous assistons.


Nous sommes des spectateurs privilégiés et ce statut se ressent bien lorsque l’on parcourt la plage, que l’on accompagne les personnages pendant leur ronde… Même sans humain, cet environnement reste dangereux du fait de la présence des Séléniens. Sont-ils les vrais ennemis pour autant ? Veulent-ils exploiter les gemmes (esprit capitaliste es-tu là ?) ? Je vous l’avais dit, les questions fusent !


Il m’aura fallu les deux premiers tomes pour pouvoir mieux me situer par rapport à cette œuvre. Ce monde, son fonctionnement, ses menaces, Phos et les autres... c’est tout un scintillement qui s’offre à nous avec des moments de joie, de tristesse. La variété des sentiments éprouvés au fil des pages fait écho à la variété des cristaux rencontrés.


Si j’avais un seul regret à formuler, il serait très secondaire et prendrez cette forme : au début du tome 1 se trouvent quelques pages en couleurs où l’on peut voir les gemmes, Phos et les autres. J’ai tellement apprécié ce jeu des couleurs, que j’ai par la suite regretté que toute la série ne soit pas en couleurs. (Attention, cela ne veut pas dire que les pages en noir et blanc sont décevantes !)


L’Ère des Cristaux est l’ovni de ce début d’année. Un bel ovni, qui vous embarque pour son univers et qui ne vous donne pas envie de le fuir. C’est une expérience de lecture assez incroyable. Allez, si vous résistez encore, lisez le début de la série disponible ici. Les cristaux n’attendent plus que vous…

Anvil
8
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Manga/manhua... lus en 2016 et Intégrale du manga L'ère des Cristaux

Créée

le 29 mars 2016

Critique lue 387 fois

2 j'aime

Anvil

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2

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