Je m'appelle Marquez, Nevada Marquez. Parfois on me demande ce que je fais dans la vie, c'est toujours compliqué pour moi de répondre... Je retrouve des gens, je livre des trucs, je remets les acteurs dans le droit chemin, sur la route Yellow Brick Road vers le magnifique pays d'Oz. Autrement dit, Hollywood ! Et vous savez quoi ? Et bien le boulot ne manque pas. Si je vous racontais les escapades de nos stars de l'écran ! Les ligues de vertu ferai immédiatement fermer cette nouvelle Babylone ! Aucune raison de faire ça... Ça ne vous regarde pas !
Nevada tome 1 : L'étoile solitaire, par les scénaristes Fred Duval et Jean-Pierre Pécau est une relecture atypique du western dont la force centrale provient de la conception de son décor mélangeant deux mondes : celui du vieux far west, à celui du Hollywood des années 50, que l'on ne cesse de traverser. Un western moderne soupoudré d'un polar noir sur un scénario efficace dans lequel l'on suit un personnage principal qui tient la route avec Nevada Marquez, qui à bord de sa moto sillonne une toile de fond hypnotique et désenchanté à la frontière américano-mexicaine. Nevada bosse comme agent de terrain à tout faire pour sa patronne Louise Hathaway (avec qui il entretient des rapports particuliers), productrice renommée au service d'un Hollywood naissant mais déjà vicieux qui derrière les paillettes laisse entrevoir toutes les dérives perfides de ce beau monde avec qui il faut composer. Hathaway confie à Nevada la tâche de retrouver l'acteur Mc Nabb alias l'Etoile solitaire, un comédien alcoolique imbu de lui-même qui s'est fourré dans une belle galère pas possible en se frottant à un mafieux mexicain pas commode qui le retient en otage alors qu'il est censé débuter un tournage très important pour Hollywood. C'est ainsi que Nevada sur sa moto à travers un rythme endiablé dont on tourne allègrement chaque page, va se lancer dans une poursuite où les événements se succèdent à une vitesse folle soutenue par un suspense fonctionnel et des actions autant violentes que divertissantes.
Les vignettes d’ouvertures posent instantanément le ton de cette bande dessinée, par le prisme d'une séquence élégante sur les grands espaces américains contrastés par une ambiance poussiéreuse et sale d'une ville ravagé par la crise qui abrite en elle une population dévoyée et corrompue par tous les vices. Un ouest sauvage qui ne fait plus rêver et qui semble n'être qu'un léger souvenir faisant fantasmer le plus nostalgique. Avec Nevada Marquez, on se lance la conquête de l’Ouest désenchantée, que les dessins de Colin Wilson, servies par la belle colorisation de Jean-Paul Fernandez, rendent crédibles et authentiques. Des vignettes qui renvoient autant aux récits de gangsters qu’aux westerns, avec une mise en images habile qui retranscrit une Amérique profonde fantomatique et sauvage où l'argent, la corruption, le sexe et les armes à feu pullulent. La sueur mêlée au sang, à la poussière et à la poudre à feu offre à ses personnages des vraies gueules. Un monde chaotique sur une imprégnation du réel très intéressante, notamment lors du chapitre sur Hollywood lors d'une soirée avec les gros pontes durant laquelle les patrons se rincent l'oeil devant le corps sculpté du champion olympique Johnny Weissmuller prêt à faire un plongeon dans une piscine. Une construction inspirée que l'on retrouve jusque dans l'explosive confrontation finale, qui nous renvoie aux meilleures heures du western et du film noir pour une conclusion qui fait un joli clin d'œil à L'homme qui tua Liberty valance, de John Ford.
CONCLUSION :
Nevada tome 1 : L'étoile solitaire, par les éditions Delcourt est une bande dessinée très sympa présentant un univers combinant le polar noir sauce gangster à un western sauvage impitoyable, le tout à travers un modernisme étonnant offrant dès le premier volume une identité visuelle à ce titre. Un premier tome très intéressant qui promet beaucoup pour la suite à venir avec un personnage principal qu'on a hâte de découvrir plus encore.
Ça commence fort !
- C'est vrai, cette histoire de duel contre un bandit mexicain ? Il la raconte dans toutes les soirées de Los Angeles !
- Je confirme, j'y étais ! Il a réussi le tir parfait ! C'est comme ça qu'on entre dans la légende !