On connaît Taniguchi pour son talent, la force de son trait réaliste et la douceur de son message. On sait de lui qu'il a une profondeur rarement égalée. Savoir qu'il travaille en collaboration n'est pas pour effrayer. On sait, en effet, que jamais Taniguchi ne choisit un compagnon de route au hasard. Il s'agit ici de Ryuichiro Utsumi.
L'Orme du Caucase est une suite de nouvelles, chacune jouant sur le non-dit et les émotions profondes, et jamais fausses, des protagonistes. C'est beaux, c'est poétique, c'est bouleversant. Plus d'une fois, j'ai eu les larmes aux yeux tant c'est puissant.
Le Cheval de Bois est ainsi magnifique, présentant une journée au parc entre des grands-parents et leur petite-fille qu'ils connaissent à peine. Ils n'arrivent pas à la satisfaire et le soir, le grand-père comprend que le manque de sérieux de la mère a conduit la petite à un puissant traumatisme que seul lui perçoit. C'est beau.
La petite fille à la poupée m'a aussi transporté. Cette nouvelle sur un homme qui découvre le travail d'artiste de sa fille biologique plus de 20 ans après l'avoir abandonné. Être touché sans jamais tomber dans la facilité scénaristique. Le personnage principal, par exemple, n'arrive pas à un happy end, mais simplement à une étape où il peut revoir son passé sans tristesse. Les personnages ainsi, acceptent souvent mieux leur présent.
Le Parapluie est aussi une belle histoire de famille. Séparation de la mère, éloignement entre un frère et une sœur et la difficulté à se retrouver. La force de cette nouvelle est de montrer comment certaines personnes peuvent sembler mauvaises mais sont simplement incomprises. Une belle nouvelle très polyvalente puisque cela évoque le pardon, l'abandon, la solitude.
Les Environs du Musée est touchant. Une histoire d'amour entre séniors... Que demander de plus ?
Dans la Forêt parle bien du rapport entre deux frères, sur fond de disparition d'un chien. Merveilleux de détail, de puissance. Impossible de ne pas être ému.
De même, la fin de Son Pays Natal qui évoque le fait de se déraciner par amour. L'éloignement causé par la non connaissance de la langue est bien mis en place. Si le thème est très intellectuel, il n'en reste pas moins incroyablement touchant avec une fin où le talent réaliste de Taniguchi parvient à faire craquer les plus durs.
On oubliera pas une histoire entre deux frères âgés ainsi que le titre éponyme : l'orme du caucase où l'on traite du respect que l'on doit à la nature et des sous-entendus que cela entraine. Car c'est ça la force de cette BD : être emplie de sous-entendue, et donc de compréhensions multiples. Il faudra relire les nouvelles pour voir tous les détails et apprécier au mieux les récits.
Seul regret : en étant un recueil de nouvelles et en voulant, à chaque fois être très précis, Taniguchi raconte à chaque fois un contexte et redonne des récits de vie, des biographies, etc. Cela donne un aspect un brin répétitif à la fin. Un détail cela dit.
Une très belle lecture qu'on ne peut que recommander.