Arthur de Pins n’est pas le genre d’artiste à se laisser abattre au premier échec. Son projet, La marche du Crabe, il le couve depuis 2003. Il sortit tout d’abord l’année suivante un court-métrage d’animation de cinq minutes, La Révolution Des Crabes qu’il voulut prolonger en long-métrage. Le story-board du film entier étant achevé, il ne restait plus qu’à attendre que les producteurs sortent le chéquier. Seulement voilà, à force d’attendre, l’auteur a eu l’idée d’adapter ce story-board en une véritable bande dessinée, une trilogie paru entre 2010 et 2012 : La marche du Crabe.
Scénario : Cette fresque animalière met en scène un peuple de crabe, le cancer simplicimus vulgaris, sur les plages de Royan, dans les années 70. La particularité de cette espèce est de ne pouvoir se déplacer que sur le côté, sans changer d’axe. Leur mode de vie est donc bien compliqué : Ils ont assez peu l’occasion de se nourrir et de se reproduire, et se font constamment agressés par les Tourteaux. Mais parmi eux, trois crabes ont décidé que les choses devaient changer : Soleil l’idéaliste, Guitare le révolutionnaire et Bateau le candide. Ces personnages pittoresques vont donc aider leur peuple à évoluer, et à se rebeller contre leurs bourreaux. Si les situations de cette fable pourront paraître répétitive à certains, il faut tout de même rappeler que chaque volet de la trilogie développent une étape différente de l’évolution des crabes, et ne pas oublier que leur condition fait référence à celle des humains, à la manière des Fables de La Fontaine. Les humains font d’ailleurs pleinement partie du récit, de l’écolo de Greenpeace au reporter animalier. Tout cet univers est d’ailleurs orchestré avec un humour plaisant, qui rappelle la légèreté d’un film d’animation (étant donné l’origine du projet, ce n’est pas étonnant).
Dessin : Ayant choisi de travailler sous illutrator, Arthur de Pins nous offrent des ambiances variées, aux couleurs pour le moins osées. La dynamique de son trait et de son découpage est remarquable, et l’on croirait voir courir les crabes sous nos yeux. Les décors ne sont pas en reste, et l’auteur a minutieusement reconstitué les plages de son enfance à Royan. Le tout n’est peut-être pas aussi détaillé que dans Zombillénium, mais les planches ont autant de personnalité que cette dernière série.
Pour : Une intégrale des trois tomes est sortie en novembre dernier, avec un dossier très complet dans les trente dernières pages, contenant des explications de l’auteur sur la genèse du projet, des recherches graphiques, story-board, photos de repérage ; on a même droit à deux pages de questions-réponses sur les crabes par un biologiste !
Contre : Dans le dernier volet, on constate un retournement de situation trop facile et mal amené. Ce n’est probablement pas le seul problème de scénario, mais c’est le plus choquant.
Pour conclure : Arthur de Pins alias Arthur de Pinces réalise ici une trilogie passionnante, aux envolées épiques digne du seigneur des anneaux mêlés à un humour irrésistible. Autant vous dire que l’intégrale de la série constitue un indispensable pour tout lecteur. Le projet de long-métrage n’est par ailleurs pas mort, et attends tranquillement son heure dans un tiroir. Il risque toutefois d’attendre longtemps, car son auteur planche en ce moment sur un film d’animation Zombillénium. Sortie prévue en 2017.