Ce deuxième album, qui vient clôturer le premier dyptique de cette saga, est certainement encore plus noir que le premier opus. Si la personnalité de Jonas Crow apporte, par endroits, un vent de cynisme teinté d'un humour bienvenu, le récit est âpre. Poursuivi par une horde de types complétement trépanés, notre trio s'échine à réussir sa mission. Le moins qu'on puisse dire est que ce trio de circonstance ne se fait aucun cadeau. S'ils partagent tous les trois ce point commun qu'est l'obstination d'atteindre leur but, ce n'est évidemment pas pour les mêmes raisons. C'est l'occasion d'apporter ici ou là un éclairage qui donne une réelle épaisseur à chacun d'eux. Pour le coup, voilà un titre qui a quelque chose à raconter sur ses personnages. S'ils n'échappent pas à quelques stéréotypes, ils se révèlent vraiment riches même si l'épilogue tend à adoucir certains éléments. Pas de quoi cependant gâcher le plaisir de la lecture. La réussite de cet Undertaker, c'est clairement la richesse de ses personnages. Ce qui avait été entrevu lors du premier tome est encore plus voyant ici.
Ce qui frappe, dans ce titre, c'est le juste équilibre du résultat. Le récit est riche en rebondissements (alors qu'une bonne partie du premier opus consistait à planter le décor), la psychologie des personnages prend le relai des scènes d'action quand cela est nécessaire, et le ton de l'ensemble frappe par son unité. Plus bavard mais aussi nihiliste qu'un western spaghetti, Undertalker puise aussi dans le western ricain crépusculaire et dans les thèmes traditionnels des westerns classiques à l'Américaine. Il faut cependant aimer les récits ne reculant devant aucune occasion pour s'acoquiner avec le morbide. La mort est en effet partout dans cette Danse des vautours, de ce cadavre puant la charogne à ces cibles l'escortant en passant par les dingues assoiffés de sang qui les poursuivent. Qui entretient un rapport conflictuel avec le thème de la mort pourrait ne pas adhérer. On est d'ailleurs frappé par le ton vraiment lugubre de cette Danse des vautours qui voit se succéder les scènes nocturnes et, à l'image de sa superbe couverture, les planches saturées d'un rouge profond évoquant aussi bien la chaleur que le sang. Le récit a beau se dérouler en extérieur, on voit peu la lumière, les sentiers sont étroits et la roche partout écrase sans cesse, au sens propre comme au figuré, les protagonistes.
On appréciera enfin la qualité d'un récit qui va au bout de sa démarche et qui ne déçoit pas dans sa résolution, comme c'est malheureusement trop souvent le cas. L'affrontement final sera évidemment l'occasion de voir les différents personnages se révéler à eux-mêmes, mais, surtout, l'efficacité du récit se sacrifiera jamais sa dimension morale. Celle-ci n'a rien de révolutionnaire mais elle confirme le soin apporté au volet psychologique de ce dyptique. Bien entendu, celui-ci n'est pas parfait. Certains enjeux et personnages ne sont pas exploités jusqu'au bout. Certaines scènes d'action peuvent, par moments, manquer de lisibilité mais le résultat final est vraiment très abouti. De l'excellente BD.