Conan et Bélit, la phase érotique de l'œuvre de Robert E. Howard



  • En quoi crois-tu, Conan ?

  • J'ai connu un grand nombre de Dieu, Bélit. Celui qui nie leur existence est aussi aveugle que celui qui leur fait une trop grande confiance. Je ne cherche pas à savoir ce qu'il y a au-delà de la mort. Ce sont peut-être les ténèbres, comme l'affirment les sceptiques Némédie, ou bien le royaume de glace et de nuages de Crom. Ou encore les plaine enneigées et les salles voûtées du Walhalla des peuples du Nord. Je l'ignore et cela m'importe peu. Il me suffit de vivre ma vie intensément; tant que je peux savourer le jus succulent des viandes rouges et le goût des vins capiteux sur mon palais. Tant que je peux jouir de l'étreinte ardente de bras à la blancheur d'Albâtre et de la folle exultation de la bataille lorsque les lames bleutée s'enflamment et se teintent d'écarlate, je suis satisfait ! Je laisse aux érudits, prêtres et philosophes le soin de méditer sur les questions de la réalité et de l'illusion. Je ne sais qu'une chose : si la vie est une chimère, alors moi aussi j'en suis une ; par conséquent, l'illusion est réelle pour moi. Je vis, je brûle de l'ardeur de vivre, j'aime, je tue et cela suffit à mon plaisir.



« Le personnage de Conan le Cimmérien a été créé en 1932 par l'écrivain Robert E. Howard (1906-1936). Ses aventures se déploient en vingt et une histoires - vingt nouvelles et un roman - toutes indépendantes les unes des autres. La présente collection Conan le Cimmérien propose aux meilleurs talents de la bande dessinée francophone de faire leur adaptation de ces textes fondateurs, selon le principe un ouvrage = une aventure complète = une vision = un auteur (ou une équipe d'auteurs). »


Pour inaugurer cette série d'adaptation en bande dessinée, Jean-David Morvan et Pierre Alary présentent la fameuse rencontre entre Conan le Cimmérien et Bélit, Reine de la Côte noire, personnage emblématique apparu dans la 6ème nouvelle de Robert E. Howard. Un choix plus ou moins judicieux puisqu'il favorise un arc mouvementé qui va illustrer la philosophie de vie du Cimmérien aux côtés de Bélit. Seulement, pour une première n'aurait-il pas été plus judicieux de se focaliser essentiellement sur Conan ? Le scénariste, Jean David Morvan, compose adroitement son récit par le biais d'une narration tumultueuse et expéditive qui se conjugue avec une prose éditoriale qui transmet naturellement l'esprit du texte d'Howard avec le langage propre du scénariste, offrant une structure stable à l'aventure. Les moments de bravoures barbares s'enchaînent les uns après les autres dans une course folle où les cadavres s'empilent jusqu'à former une véritable montagne, celle où le Dieu Crom a élu domicile.


À travers le format BD ça avance vite très vite, du coup on ne s'ennuie pas une seconde ce qui fait qu'on vient même à regretter que cela ne dure pas plus longtemps. Pour autant, le récit parvient habilement à retranscrire la relation explosive qui est au centre de l'intrigue entre Conan et Bélit. Une passion amoureuse sulfureuse où les corps ne cessent de s'entremêler dans une décharge débordante. Une pulsion dévorante qui s'exprime par des souffles de braise et des peaux perlées de sueur. Une belle exécution qui rend hommage à la vision d'Howard qui par cette relation faisait officiellement rentrer la sexualité dans les nouvelles de Conan. Conan est fidèle à lui-même et fait du sale dans une mouvance dramatique bienvenue où celui-ci exprime son fond de penser. Bélit est une femme forte qui s'assume pleinement en tant que guerrière-pirate accomplie, et n'a rien à voir avec les compagnes sexuelles d'une nuit que cumule Conan. Le barbare et l'amazone : un amour percutant qui fait fureur ! Intense et sans détour !


Les dessins de Patrice Louinet me posent un véritable souci. Si la mise en scène est habilement retranscrite à travers des vignettes qui illustrent efficacement les actions qu'elles soient d'ordre meurtrier ou d'ordre sexuel, le graphisme lui vient alléger le tout. Une approche visuelle au caractère cartoonesque qui vient souvent dénaturer l'atmosphère rude illustrée par cette aventure. Des dessins par instants superbes qui s'étalent sur des doubles pages éloquentes, mais qui par moments tombent sous des traits caricaturaux désorientants. Conan manque de masse musculaire, et Bélit a des traits enfantins. Des estampes qui en temps normal sont superbes, mais qui ne collent pas vraiment avec le cadre austère et violent de Conan. Une approche technique étonnante qui au final offre un étrange mélange de tons, qu'heureusement les belles couleurs de Sergio Sedyas viennent rehausser.



CONCLUSION :



Le duo Jean-David Morvan et Pierre Alary présentent avec Conan le Cimmérien, le premier one-shot d'une collection qui propose à des talents de la bande dessinée francophone de faire l'adaptation des textes fondateurs de l'œuvre culte de l'écrivain Robert E. Howard. Une approche totalement bienvenue qui offre une première bande dessinée épique dont on tourne allègrement les pages à travers des dessins cartoonesques aussi étonnant que dérangeant. Une aventure mouvementée qui illustre efficacement la rudesse de ce monde et la relation érotique passionnée entre Conan le Cimmérien et Bélit, Reine de la Côte noire.


Un bon début qui sans la sublimer, fait honneur à la saga littéraire de Robert E. Howard !



Loups des mers bleues, il est temps pour vous d'assister à ma danse. La danse d'amour de Bélit, dont les ancêtres étaient Rois d'Askalon ! Crois-moi, les verts bourgeons s'éveillent au printemps, l'automne peint les feuilles d'un feu sombre; crois-moi, j'ai gardé mon cœur inviolé, pour prodiguer un un seul homme mes désirs ardents. Dans la citadelle de mort aux pierres éboulées. Ses yeux furent captivés par cet éclat impie, une étrange folie me saisit à la gorge, comme si un rival s'était interposé entre nous. Prends-moi et écrase-moi de ton amour ardent !


Créée

le 18 mars 2022

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