Nicolas de Crécy fait rimer manga, catch et poésie

En 1998, Nicolas de Crécy triomphe au Festival d’Angoulême. Cette année-là, il remporte l’Alph-Art du meilleur album pour « Laid, pauvre et malade », le deuxième tome de la série « Léon la Came », qu’il réalise en duo avec Sylvain Chomet. Grâce à son univers graphique très personnel, le dessinateur français semble alors parti pour tutoyer les sommets pendant de longues années. Mais comme souvent après un départ canon, les choses ne se déroulent pas tout à fait comme prévu. Pendant un moment, Nicolas de Crécy perd même complètement le feu sacré, allant jusqu’à annoncer son souhait d’arrêter purement et simplement la bande dessinée. Heureusement, il a changé d’avis depuis lors… grâce au manga! Car aujourd’hui, c’est le Japon qui le remet en selle. Et de quelle façon! L’éditeur japonais Shueisha Publishing a eu la très bonne idée de donner carte blanche à Nicolas de Crécy pour imaginer un manga à sa sauce. Prépublié dans la revue « Ultra Jump » entre août 2014 et mars 2015, « La République du catch » est une rencontre improbable entre le format manga et l’univers unique et poétique de Nicolas de Crécy. Difficile de résumer l’histoire: dans une ville qui fait un peu penser à New York, ce polar déjanté de 200 pages met aux prises des catcheurs, des mafieux et des fantômes, et a pour personnages principaux un marchand de pianos mélancolique, une catcheuse qui s’appelle Bérénice, un manchot pianiste qui se déplace dans la ville grâce à ses notes, et un bébé maléfique qui conserve sa mère morte dans un cercueil de verre… A priori, cela paraît hautement improbable, mais grâce au sens de la poésie et du burlesque de Nicolas de Crécy, cela fonctionne à merveille. Avec « La République du catch », l’auteur français renoue avec cette imagination débridée qui faisait sa force dans « Léon la Came », tout en se réinventant complètement. Du grand art.


Pour imaginer cette histoire, l’auteur français s’est notamment laissé inspirer par la mythologie shinto des fantômes et divinités et par la culture mafieuse spécifiquement japonaise des yakusas, mais il tenait à garder la singularité de son univers. « C’est le mélange de cultures différentes qui donne une oeuvre particulière », explique Nicolas de Crécy dans une interview au site Ligne Claire. « Je n’ai pas voulu faire un sous manga. La République du catch est un vrai manga mais avec mon style que je tenais à garder ». Pour respecter complètement les codes du genre, Nicolas de Crécy a tenu aussi à adopter le rythme de réalisation très rapide des auteurs japonais. « J’ai parfois dessiné jusqu’à trente pages par mois », dit-il, en ajoutant qu’il a également travaillé la narration comme elle se pratique au Japon, c’est-à-dire « dynamique et fluide, plus proche d’un storyboard de film d’animation que d’un récit littéraire ». Y aura-t-il une suite à ce premier épisode? Cela dépendra du succès de « La République du catch ». Mais a priori, cela semble bien parti, car le livre bénéficie d’un bon accueil tant en Europe qu’au Japon. Nicolas de Crécy est donc bel et bien de retour. On ne peut que s’en réjouir!


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matvano
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le 19 mai 2015

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