"La synagogue" est bien plus qu'une bande dessinée autobiographique, Joann Sfar nous rappelant avec la narration de sa propre histoire les actes antisémites qui ont marqué la société française durant ces cinquante dernières années. Afin de donner plus de corps encore à la valeur documentaire de son album, il a rassemblé à la fin de l'ouvrage de nombreux articles de presse qui illustrent ce qu'il a appelé la "météorologie antijuive".
En l'absence de sa mère décédée alors qu'il était à peine âgé de trois ans, Joann Sfar a été élevé par son père auquel il rend ici un vibrant hommage. Très tôt orphelin de père, enfant pauvre en Algérie, celui-ci est devenu avocat et un temps maire adjoint de Nice ; profondément humain, il a entre autres initiatives oeuvré dès le début des années 70 pour aider les femmes victimes de violences conjugales.
Dans cet album foisonnant, Joann Sfar opte pour une narration qui n'a rien de chronologique, l'adolescent gardien de la synagogue de la première page cédant la place à l'homme de 49 ans réchappé miraculeusement du Covid, auquel succède l'enfant que les chants de la synagogue effrayaient, avant que l'on retrouve l'adolescent qui pratique à haute dose les arts martiaux, ce va-et-vient se poursuivant jusqu'à la fin d'un ouvrage dont l'humour vient adoucir la teneur du propos.