Avec Le Bouclier Arverne (1967), René Goscinny et Albert Uderzo prouvent une fois de plus leur talent pour mélanger humour, aventures épiques, et un soupçon de satire historique. Cette fois, nos irréductibles Gaulois partent en quête d’un bouclier légendaire, avec une bonne dose de vin d’Auvergne, de disputes romaines, et de running gags savoureux. Résultat ? Un album aussi pétillant qu’un banquet d’Abraracourcix (avec modération, bien sûr).
L’histoire démarre lorsque Abraracourcix, victime d’un abus gastronomique, doit se rendre aux thermes d’Aqua Calidae pour un traitement. Astérix et Obélix l’accompagnent, mais ce qui devait être un voyage tranquille vire rapidement à l’aventure : le bouclier arverne, symbole de la résistance de Vercingétorix, refait surface et devient l’objet d’une chasse au trésor loufoque où Gaulois et Romains rivalisent d’astuces… et de maladresses.
Astérix, toujours le cerveau du duo, brille par son sens de l’observation et son humour pince-sans-rire. Obélix, quant à lui, offre une fois encore des moments d’anthologie avec ses remarques naïves et son obsession pour les sangliers. Leur dynamique fonctionne à merveille, notamment dans leurs interactions avec les habitants d’Auvergne, qui semblent plus préoccupés par leurs vignobles que par l’histoire glorieuse de leur région.
Les Romains, dirigés par le pataud préfet Gracchus Garovirus, ajoutent une couche supplémentaire de comédie. Incapables de mettre la main sur le bouclier, ils s’emmêlent dans leurs propres intrigues et finissent par se ridiculiser à chaque page. Leur présence illustre parfaitement le talent de Goscinny pour tourner en dérision l’administration et la bureaucratie.
Visuellement, Uderzo s’amuse avec les paysages auvergnats, entre montagnes majestueuses et vignobles bucoliques. Les scènes de bagarre, toujours aussi dynamiques, sont ponctuées de détails hilarants, comme les postures absurdes des Romains malmenés. Les expressions des personnages, notamment celles d’Obélix face à la cuisine diététique des thermes, renforcent l’impact comique.
Narrativement, l’album est un modèle d’équilibre. L’intrigue avance à un rythme fluide, entre moments de tension légère et gags visuels ou verbaux. Goscinny jongle habilement avec les références historiques (qui feront sourire les amateurs d’histoire) et les jeux de mots, tout en maintenant un ton accessible à tous.
Si Le Bouclier Arverne a un petit défaut, ce serait peut-être l’absence d’un grand méchant charismatique. L’histoire repose davantage sur les quiproquos et les péripéties que sur une confrontation directe avec un antagoniste marquant. Mais cette approche convient parfaitement au ton léger et comique de l’album.
En résumé, Le Bouclier Arverne est une aventure délicieusement drôle et bien rythmée, où Goscinny et Uderzo rendent hommage à la gastronomie et à l’histoire gauloise avec leur humour inimitable. Entre les disputes romaines, les dégustations auvergnates, et les baffes distribuées avec amour, cet album est une lecture incontournable pour tous les amateurs de bonne humeur et de potion magique. Une chasse au bouclier qui prouve que, même en Auvergne, les Gaulois savent comment faire bouger les choses !