Avec cet album, Goscinny abordait un pan de notre Histoire antique en faisant vibrer la fibre patriotique gauloise avec l'évocation de Gergovie et de Vercingétorix ; on voit même le célèbre chef gaulois en première page où Uderzo en profite pour ridiculiser César. En même temps, Goscinny poursuivait ici la parodie des stéréotypes liés aux particularismes régionaux, qui est exagérée, mais comportant toujours une part de vérité ; ainsi, après les Lutéciens pressés, les Goths rugueux, les Massiliens exubérants et joueurs de pétanque, les Bretons formalistes, les Egyptiens soumis et les Normands farouches, on assiste au parler bougnat des Arvernes marchands de charbon, détail que j'ai bien apprécié, puisque je connais bien l'Auvergne du Puy-de-Dôme et de l'Allier, pays des cures thermales.
Goscinny excelle toujours dans des astuces verbales fort plaisantes, comme les noms de Fanfrelus, Perrus et Coquelus plutôt anodins prononcés ainsi, mais vus sous l'angle Arverne, ça donne Fanfreluche, Perruche et Coqueluche, quelle subtilité, de même que le chassé-croisé entre Gergovie et Alésia (nom qu'il faut ignorer) est assez amusant. Le dessin d'Uderzo est maintenant posé et plein de souplesse, il ne variera pratiquement plus, il en profite ici dès que nos Gaulois sont en cure à Aquae Calidae pour montrer des termes romains, grande institution de la société romaine ; on y voit aussi la forme presque définitive de Bonemine, César y fait une apparition finale pleine de dignité pour tenter de contrebalancer le tribun et les soldats romains qui se sont encore ridculisés avec le coup du charbon, de même que la figure du centurion Ballondebaudrus à la trogne savoureuse, annonce un peu celle d'un autre Romain saoulin : Roméomontaigus, dans le Cadeau de César.
Ainsi, sans se hisser au niveau des chefs-d'oeuvre que sont Astérix en Corse, le Tour de Gaule, Astérix chez les Bretons ou Astérix chez les Belges, les auteurs livrent ici un excellent album que j'ai toujours apprécié.