War zone
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La Première guerre mondiale bat son plein. Corentin s’affaire dans l’espace dédié aux animaux d’un vaste cimetière. Ses collègues sont mobilisés les uns après les autres. Que pourra-t-il faire quand les autorités décideront de réquisitionner les lieux pour en faire des usines d’armement construites dans l’urgence ? Le Dernier refuge est une ode à la cause animale et le chant du cygne d’une humanité qui part à vau-l’eau.
Jacques-Charles Fombonne, le président bénévole de la SPA, rappelle en appendice de cette bande dessinée que quatorze millions d’animaux prirent part aux combats, à côté des soldats, durant la Première guerre mondiale. Le Dernier refuge s’en fait l’écho en mettant en scène un chien secourant des blessés sur le front et partageant le quotidien difficile des hommes envoyés sur les champs de bataille. Ce contexte militaire particulier permet d’éclairer d’une lumière profuse certains enjeux : Corentin, responsable d’un lieu d’inhumation dédié aux animaux, est mobilisé alors même que le cimetière dont il a la charge s’apprête à être détruit et remplacé par des unités de fabrication d’armes. La raison en est simple : l’ennemi ne peut bombarder un cimetière.
Il y a beaucoup d’humanité dans la manière dont Pierre-Roland Saint-Dizier, journaliste et scénariste, s’empare de la thématique animale. Son héros n’est autre qu’un orphelin s’étant tôt lié d’amitié avec un chat errant. Il a mémorisé et dessiné l’histoire de la plupart des animaux inhumés dans l’espace sépulcral dont il a la charge. Il recueille les chats et chiens sans attache et s’identifie volontiers à eux, leur prêtant une sensibilité qu’il peine parfois à entrevoir parmi les siens. Si une histoire d’amour naissante le taraude au moment de partir au front, son cimetière, menacé de destruction, occupe tout autant ses pensées : que va-t-il advenir de tous les animaux n’ayant d’autre refuge que celui-là ?
Alex-Imé dessine à traits fins un conte au titre révélateur : le dernier refuge, ce n’est pas seulement celui des animaux, mais aussi celui de Français fuyant les bombardements et d’une humanité soudainement rendue au dernier degré d’une folie belliqueuse. Ainsi, pendant que Corentin apporte différents témoignages d’affection aux bêtes qui l’entourent, les villageois vivotent grâce aux tickets de rationnement ou sont expédiés, dans les vingt-quatre à quarante-huit heures, sous les feux ennemis. Cette réalité-là, la plus cruelle, est tout à fait étrangère à ceux qui, pourtant, « ne sont que des animaux ». Elle l’est tout autant vis-à-vis de Marco, garçonnet bientôt mobilisé malgré lui, symbole d’une jeunesse sacrifiée et pivot d’une histoire filiale touchante.
Critique publiée sur Le Mag du Ciné
Créée
le 23 juil. 2019
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