Ce qui est particulièrement agréable avec la période Goscinny-Dargaud c'est qu'elle enrichit vachement l'univers Lucky Luke avec l'introduction de nouveaux héros de l'Ouest (Jesse James, Chasseur de primes) ou d'histoires hyper denses (La Diligence, Canyon Apache pour ne citer qu'elles) et tente de se détacher de la ficèle Dalton. Et quand c'est le cas, c'est fait avec brio : Ma Dalton.
Après le décès de Goscinny en 1977, ça n'allait pas louper, les repreneurs de Lucky Luke ont fait dans l'efficace à défaut du créatif : user des méchants les plus charismatiques de l'univers, les Dalton, avec leurs personnalités dans lequel le public a désormais ses habitudes : Joe le teigneux et Averell le bébête de la fratrie. Forcément avoir 4 méchants en un, ça donne du rythme et des dialogues tout trouvés.
Ce Magot s'inscrit dans ce nouveau schéma. Prise de risque limitée : les Dalton sont dans un pénitencier, vont s'en échapper pour aller cher un butin d'ampleur, suggéré par le codétenu. Lucky Luke, dans les parages veille à ce que tout rentre dans l'ordre.
Globalement, l'histoire donne le sentiment d'être trop tirée ! 10-12 planches pour l'évasion, 15 planches pour trouver le moyen de mettre la main sur le magot alors qu'il est dans la ville d'à côté et 15 planches pour mettre la main dessus avec une fin plutôt bâclée (quand c'est à la cavalerie de clôturer de manière abrupte l'album, c'est que l'auteur manquait d'inspi). Le scénariste Vicq semble en difficulté de maintenir un rythme plein sur un album complet et allonge inutilement les passages.
Néanmoins, il y a de ci de là de belles choses :
- un juge "débonnaire" qui tient pour horreur la répression, et sanctionne les méfaits par des tapotes sur la joue couplées par des "petit polisson, va!". Pas la grandeur d'un Roy Bean dans Le Juge mais on se souviendra du Juge Poindexter.
- des Dalton plutôt bien marrants, dont l'esprit est préservé et ne sont pas encore la caricature d'eux mêmes (Cavalier seul...). Des passages de Joe parfois même excellents :
S'il y a une chose que je déteste, c'est un banquier consentant ! Çà enlève tout le plaisir du hold-up!!! (planche 15)
Jack et William, vous êtes finalement plus bêtes qu'Averell qui est pourtant le plus bête de vous trois ! (planche 17)
Que la suite de Morris puis Goscinny au scénario est difficile : entre des scénarios pas assez ambitieux où il ne se passe finalement pas grand chose (celui-ci) et ceux, plus récents, dans lesquels les auteurs veulent mettre un nombre incalculables de péripéties (Lucky Luke contre Pinkerton, Un cow-boy à Paris).