James Bond avant l'heure.
En 1936, le journal catholique Cœurs Vaillants, édité à Paris, propose à Hergé de créer une nouvelle BD : celle-ci sera dans la veine de Tintin, mais les directeurs de la publication sont réservés sur ce reporter solitaire, et ils commandent à Hergé de prendre pour héros un jeune garçon et sa famille. C’est ainsi que Hergé crée tout d’abord Jo Legrand, puis sa sœur Zette, leurs parents, et le petit singe Zocko. Des aventures riches en rebondissements et pleines de bonnes valeurs traditionnelles, qui pourraient être franchement ennuyeuses, s’il n’y avait le génie de Hergé pour dépasser les contraintes imposées par Cœurs Vaillants.
Hergé introduit ici une mystérieuse histoire de piraterie en plein cœur de l’Océan Atlantique, et prend son temps pour la développer, avant de relier ces événements aux personnages de Jo, Zette et Jocko. Voilà rapidement le trio propulsé dans le repaire des ravisseurs, une base sous-marine digne d’un méchant de James Bond : avec son arme secrète, son automate de guerre, ses acolytes tous plus affreux les uns que les autres, et ses tanks dédiés à l’exploration sous-marine, le méchant de l’histoire semble tout droit sorti d’un bouquin de Ian Fleming. Sans oublier le gaz utilisé pour endormir les marins, une technique à peu près aussi délirante que l’attaque des hélicoptères de Goldfinger sur Fort Knox !
Bref, une aventure tout en rebondissements, et bourrée de pointes d’humour (notamment les anthropophages qui engraissent Jo et Zette). Pas aussi travaillé qu’un Tintin, mais Hergé s’est visiblement pas mal amusé à créer cette intrigue fantaisie, qui constitue somme toute un bon prélude aux aventures du petit reporter. Le talent d’Hergé, c’est aussi de savoir plaire aux plus jeunes.