De mon enfance, au cours de laquelle je pouvais aimer n’importe quel livre pourvu que les mots en fussent beaux, et qui a vu mes parents n’avoir de cesse de me donner un goût de la nature dont je me demande parfois si chez moi il se distingue vraiment du plaisir bobo consistant à chercher dans les forêts une forme de ressourcement individualiste qui a bien plus à voir avec le loisir qu’avec la vie, de cette enfance, disais-je avant d’essayer de jouer à Marcel Proust, je garde le souvenir d’avoir connu très tôt beaucoup de noms d’oiseaux – au sens propre. Je serais incapable de reconnaître un gypaète barbu, un balbuzard pêcheur ou un grèbe tridactyle, je savais les reconnaître dans le Guide des oiseaux d’Europe, mais je n’avais pas oublié ce qu’est la bondrée apivore – en néerlandais wespendief – qui donne son titre à l’album.
Oui, le Retour de la bondrée vient des Pays-Bas (ou de Belgique flamande ?). Et je ne sais pas s’il y a un rapport, mais cette histoire d’un couple qui part à vau-l’eau et d’un trentenaire qui se cherche se distingue du tout-venant de la production française dans ce domaine, bien souvent plus nombriliste encore que le début de cette critique. D’autre part, j’ose à peine imaginer ce que l’approche intellectualisante du roman graphique à la française aurait fait d’une métaphore mettant en scène des abeilles et un oiseau qui en mange…
Qu’on soit bien d’accord : il ne s’agit pas ici d’un chef-d’œuvre de la bande dessinée. Mais le trait d’Aimee De Jongh a le mérite de faire naître une ambiance, propice au doute sans être tourbillonnante, et son scénario, tout bien ficelé qu’il soit, ménage, dans l’intrigue et dans les dialogues, les failles suffisantes pour que le lecteur joue son rôle de lecteur – réfléchir, s’identifier, s’agacer, douter, penser à autre chose, ne pas s’identifier, se souvenir, etc. C’est peut-être ce plaisir enfantin sans être puéril que procurent certains albums.

Alcofribas
7
Écrit par

Créée

le 9 nov. 2019

Critique lue 92 fois

Alcofribas

Écrit par

Critique lue 92 fois

D'autres avis sur Le Retour de la bondrée

Le Retour de la bondrée
BenoitRichard
6

Critique de Le Retour de la bondrée par Ben Ric

Derrière cette étrange couverture représentant une bondrée (un rapace qui ressemble à une buse) sa cache le troublant récit d’un libraire nommé Simon Antonisse qui, après avoir assisté, impuissant,...

le 10 avr. 2016

1 j'aime

Le Retour de la bondrée
ManfredAckermann
8

Critique de Le Retour de la bondrée par Manfred Ackermann

Aimée de Jongh a récemment fait parler d'elle avec l'excellent "Jour de Sable" ou bien le non moins intéressant mais totalement différent "Soixante printemps en hiver".Intéressant donc de partir à la...

le 22 mars 2023

Le Retour de la bondrée
taboulait
8

Critique de Le Retour de la bondrée par taboulait

Super dessins et chouette histoire.J'ai été par contre ultra génée de voir que l'autrice romance l'attirance d'un mec d'au moins 30 ans pour une lycéenne, comme si c'était cool, alors que c'est de...

le 25 août 2022

Du même critique

Propaganda
Alcofribas
7

Dans tous les sens

Pratiquant la sociologie du travail sauvage, je distingue boulots de merde et boulots de connard. J’ai tâché de mener ma jeunesse de façon à éviter les uns et les autres. J’applique l’expression...

le 1 oct. 2017

30 j'aime

8

Le Jeune Acteur, tome 1
Alcofribas
7

« Ce Vincent Lacoste »

Pour ceux qui ne se seraient pas encore dit que les films et les albums de Riad Sattouf déclinent une seule et même œuvre sous différentes formes, ce premier volume du Jeune Acteur fait le lien de...

le 12 nov. 2021

21 j'aime

Un roi sans divertissement
Alcofribas
9

Façon de parler

Ce livre a ruiné l’image que je me faisais de son auteur. Sur la foi des gionophiles – voire gionolâtres – que j’avais précédemment rencontrées, je m’attendais à lire une sorte d’ode à la terre de...

le 4 avr. 2018

21 j'aime