Quasi inconnu en France, l’Américain Ryan Andrews n’est pourtant pas tout à fait un nouveau venu dans la bande dessinée, ayant été deux fois nommé pour les Eisner Awards. Aujourd’hui, il vit au Japon, ce qui permet d’éclairer en partie ce charmant récit jeunesse débutant un peu comme les « Goonies » ou « Stand By Me » et bifurquant très vite vers le conte poétique, ce qui n’est pas sans rappeler les œuvres du génial Miyazaki. Et lorsqu’on sait l’importance que revêt la symbolique des lampions dans la culture asiatique, on est amené à penser que l’auteur a su parfaitement s’acclimater dans l’Empire du soleil levant.


Le récit, même s’il semble plus s’adresser à un jeune public, pourra aussi toucher l’enfant qui sommeille (plus ou moins) en tout adulte. Il est intéressant de voir comment la relation entre les deux enfants, Ben et Nathaniel, va évoluer. Nathaniel faisait un peu office de tête de turc, repoussé et méprisé par la bande de Ben pour son côté un peu simplet, du moins en apparence. Au final, seul Ben et Nathaniel suivront l’aventure jusqu’au bout, au corps parfois défendant de Ben qui assume difficilement de devoir faire équipe avec cet idiot de Nathaniel. Il est vrai que ce dernier dérange avec son enthousiasme candide et sa générosité dépourvue d’arrières pensées, parfois aux limites de l’inconscience. Le parfait profil de victime ! Et pourtant, Nathaniel ne perdra pas sa pureté morale au cours de ce voyage improbable. C’est au contraire Ben qui apprendra à apprécier son nouvel ami, le seul à ne pas avoir rompu le serment, à l’inverse du reste de la bande…


Si à certains moments l’histoire en elle-même peut paraître quelque peu nébuleuse dans sa fantaisie onirique, le dessin, très plaisant, reste le point fort de l’album. Dans un style « cartoon » à la fois nonchalant, dynamique et délicat, Ryan Andrews a su créer un univers varié et inattendu, plein de douceur, où le merveilleux est renforcé par une jolie mise en couleur. La palette est limitée, avec une tonalité différente selon les passages, les planches les plus réussies étant celles où domine un bleu aux cent nuances, avec des ciels étoilés splendides.


« Le Serment des lampions » se lit donc comme une quête initiatique, où ce qui compte n’est pas tant l’émerveillement ressenti face au « Graal » découvert que la façon dont elle nous transforme. Et comme toutes les quêtes morales se ressemblent peu ou prou, l’auteur nous livre pour la réussir ce précepte en forme de leitmotiv à travers le fameux serment : « On ne regarde pas en arrière ». Un précepte que ce Japonais d’adoption s’est vraisemblablement appliqué à lui-même.

LaurentProudhon
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le 5 août 2020

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