En plus d’étoffer l’univers de la série XIII, les one-shot « XIII Mystery » favorise les heureux hasards d’une rencontre, parfois fructueuse, en faisant collaborer des auteurs ne se connaissant pas. Ainsi, Xavier Dorison et Ralph Meyer ne se sont pas arrêtés à « La Mangouste » et, outre le lancement cette année de leur nouvelle série « Undertaker » qui est bien partie pour perdurer, ont aussi publiés en 2012-2013 un diptyque nordique tout aussi âpre que leur western : « Asgard ».
Scénario : Dans la pure tradition du récit viking, se succèdent donc combats épiques et virils, survie en milieux hostiles et enjeux mythologiques qui font d’Asgard un Hercule scandinave. C’est aussi le portrait d’une société aux fondements malades, à l’image de la rugosité de son climat : alors que la superstition de ses parents a bien faillit assassiner Asgard dès sa naissance, les villages vikings ne voient pas leur subsistance que dans la pêche, mais surtout dans les pillages et massacres en règle. Du coup, certains voient dans les sévices répétés d’un Krökken sur les drakkars une punition des dieux qui voudraient purger ces froides contrées de leurs bourreaux. Asgard Pied-de-Fer, Asgard le déchu, voit quant à lui dans sa partie de chasse au Krökken un moyen de recouvrir son honneur d’antan et de défier les dieux. Mais les dures épreuves qui l’attendent risquent d’ébranler ses convictions… Dorison nous livre encore ici une histoire épaisse et solide, comme la peau du fameux Serpent-Monde.
Dessin : Et si les personnages prennent finalement le pas sur la construction d’un univers déjà crédible et passionnant, les décors et le dynamisme des planches de Meyer lui donnent toute son ampleur et sa force évocatrice. A coups de montagnes enneigés, lacs gelés aux rochers vertigineux et de scènes d’actions dantesques, le dessinateur déploie son trait avec force de détails et d’expression sur de vastes cases, dans un registre que Peter Jackson ne renierait certainement pas.
Pour : La narration de Dorison est décidément infaillible : tout en ne négligeant pas ni son ambition stylistique avec effets de transitions et une démesure des combats, ni sa portée thématique faisant d’Asgard un récit homérique et profondément symbolique, elle va toujours à l’essentiel. En effet, les personnages nous sont immédiatement familiers, et le découpage est soigneusement réfléchit pour une efficacité optimale dans le rythme et la compréhension des événements. Un cas d’école ce Xavier : pas étonnant qu’il enseigne le scénario dans une école de BD lyonnaise.
Contre : En singeant « Blueberry » avec « Undertaker » et donc « Thorgal » avec « Asgard », les deux auteurs maîtrisent leur sujet et savent s’écarter des sentiers battus, mais le dépaysement est tout de même moindre.
Pour conclure : Si certains pourraient voir dans « Asgard » un simple terrain de jeu référencé par des auteurs passionnés, le propos de l’œuvre est indéniablement riche et les dessins redoutablement peaufinés.
Ma critique du tome 1 de "Undertaker" :
http://www.senscritique.com/bd/Le_Mangeur_d_or_Undertaker_tome_1/critique/47225207
Ma critique de "Long John Silver" :
http://www.senscritique.com/bd/Guyanacapac_Long_John_Silver_tome_4/critique/38823636