Un trou dans le toit

Le sommeil de monstre, c'est tout d'abord une rare ambition. Mêler le récit de science-fiction à la catastrophe réelle pour mieux l'exorciser. Et si cela ne sonne pas nouveau, c'est que c'était déjà le propos du chef-d'œuvre Abattoir 5 de Kurt Vonnegut.

La catastrophe ici, c'est la guerre de Serbie, que représentent les étoiles vus par des orphelins depuis le trou d'obus dans la toiture d'un Hôpital. Warhole (le trou de guerre), sera d'ailleurs le nom du méchant.

Et il y a ce monde terriblement dystopique, où un occident ultra-libéral vit sous la menace d'une mafia d'obscurantistes religieux (arrêtez-moi si cela vous rappelle quelque chose), et principalement du maléfique docteur Warhole, précédemment nommé. Le tout renforcé par le trait sombre de Bilal.

Dans le côté pour, il y a la manière dont Bilal arrive à rendre son récit alambiqué et son monde fantasmé absolument clair pour le lecteur, projetant les craintes actuelles dans un futur proche où l'air de Moscou est toxique et où la tour Eiffel est devenu une zone de haute sécurité. Il y a le côté très bien rendu de "thriller de science-fiction dystopique", genre à part entière depuis K. Dick. Il y a ces fulgurances soudaines, comme le rayon laser meurtrier vu par le père de l'une des protagonistes depuis l'espace, où une poésie sourd finalement, enfin, de toute cette noirceur.

Pour le côté contre, il y a un manque de développement des personnages, sacrifiés au rythme de l'intrigue, réunis uniquement par le fil rouge de leur petite enfance dans un hôpital yougoslave pendant la guerre de Serbie. Mais, étant le premier tome d'une série de quatre, il est tout à fait possible que cela s'étoffe par la suite. Sinon, ce premier volet se suffit à lui-même, malgré sa fin ouverte.