Les Anciens ont enfin renoncé à leur effroyable projet de suicide collectif. Phalleina ne sera pas coulée par - et avec - ses habitants. Mais cela signifie que les plus jeunes doivent à présent se prendre en main pour faire face à leurs redoutables opposants. C’est que les citoyens de l’Empire ont renoncé à leurs émotions, les livrant aux "Nous", ces créatures qui permettent de mouvoir leurs gigantesques vaisseaux sur l’immense mer de sable qui constitue désormais le monde connu.
Forts de leurs sentiments, du deuil vécu, et de leur culture, dont le héros Chakuro, graphomane, se fait le gardien et le passeur, les Enfants tentent d’élaborer une stratégie pour limiter leurs pertes. Le but avoué n’est même pas la victoire, mais seulement l’espoir de vivre encore un peu, ensemble. Et pour cela il faut commencer par repousser un envahisseur qu’ils ne comprennent pas, et qui ne cherche pas à les comprendre en retour.
L’ensemble de ce volume prépare donc l’inévitable confrontation. Une tonalité, tragique, imprègne le récit, renforcée par un sentiment de fatalité rendu palpable par les pertes subies au tome précédent. Sur ce fond, émerge une ineffable beauté, à travers la peinture de cette civilisation imaginaire et la caractérisation de ses habitants.
C’est bien là que réside la force des Enfants de la Baleine : dans cette puissance de l’imaginaire au service d’une aventure universelle. La pause constituée par la Fête des Sables, célébrée par les enfants ou les chants entonnés par les personnages émerveillent, tandis que la résolution dont ils font preuve et l’horreur vide de sens à laquelle ils sont confrontés saisissent le lecteur.
Voguant entre drame et poésie, le voyage se poursuit, d’une rare justesse, et l’on tremble, dans l’effroi et l’attente de la suite de cette étonnante odyssée des sables à l’ambiance de fin des temps.
Chronique originale et illustrée sur actuabd.com