Les Temps mauvais par jerome60
« De 1936 à 1939, eut lieu en Espagne ce que certains historiens, versés en littérature, ont appelé « la dernière guerre romantique ». Pour ceux qui l’ont vécue, ce fut simplement la guerre. »
Madrid, de 1936 à 1939. Suite au putsch militaire de Franco, la ville est assiégée et les républicains tentent de résister au fascistes. Carlos Gimenez raconte la guerre civile à travers le quotidien d’une famille qui l’a vécue « de plein fouet ». Mr Marcelino, le père, est un socialiste modéré. Entouré de sa femme et de ses trois enfants, travaillant dans un atelier de confection, il va endurer les privations et vivre au milieu de l’horreur et du chaos. Arrestations et exécutions arbitraires, bombardements, famine, maladie, promiscuité, insécurité permanente, rien ne sera épargné aux madrilènes pendant trois ans, jusqu’à la défaite.
Cette intégrale regroupant quatre albums inédits en France se compose d’historiettes de quelques pages. Des tranches de vie sidérantes de réalisme qui ne glorifient personne mais cherchent à montrer un conflit vécu à hauteur d’homme par une population terrorisée.
Dans un dossier très complet en fin d’ouvrage, l’auteur explique sa démarche : « Je voulais raconter la guerre du point de vue de ceux qui l’ont subie, ceux qui recevaient les bombes et ont connu la terreur, la faim, l’angoisse et la misère. Je voulais raconter la guerre en minuscules, la guerre du quotidien, celle des coulisses, celle de ceux dont on ne parle pas dans les journaux, ni dans les manuels d’histoire. »
Impossible selon moi d’avaler ce pavé d’une traite, il est préférable de procéder par étapes pour éviter l’indigestion et profiter au maximum de la richesse de l’ensemble.
Le dessin en noir et blanc serait davantage adapté à un registre humoristique mais plus on avance dans le recueil et plus on se dit qu’il colle parfaitement au propos. D’ailleurs, un trait plus réaliste aurait sans doute rendu les événements relatés à la limite du supportable.
Il faut aimer le genre, il faut aimer le sujet, il faut accepter d’être sacrément bousculé par l’atrocité du conflit. Mais il faut aussi reconnaître que c’est de la très grande BD historique, une somme d’une rare qualité que j’ai trouvé absolument passionnante.