Il n'est jamais trop bon de vouloir camper sur ses positions. Ne serais-ce que parce que votre avis peut naturellement évoluer avec le temps.
Initialement j'ai avisé les 10 premiers tomes du Tueur. Et si les 5 premiers m'ont immédiatement plu, les 5 suivants m'ont vraiment refroidi au point de ne pas avoir envie de donner sa chance au 3e cycle de la série.
Lorsque j'ai constaté que ce dernier ne faisait que 3 tomes et apportait une conclusion définitive à la saga ma curiosité a repris le dessus et je me suis embarqué sur cette dernière ligne droite.
Premier constat : c'est positif au point de réévaluer toute la série de façon rétrospective.
Au final, cette dernière se décompose ainsi :
- 1er cycle : tome 1 à 5 : l'histoire de base (et qui, d'ailleurs, se suffit très bien à elle même) où vous suivez le chemin (et les pensées) d'un tueur à gage lors d'une affaire qui ne se déroule pas comme prévu ; le ton est résolument misanthrope voire légèrement provocateur mais ces éléments restent savamment dilués dans une intrigue intéressante.
- 2e cycle : tome 6 à 10 : rebelote, nouvelle affaire "douteuse" mais pour ne pas tomber dans la redite pure, les auteurs placent cette intrigue dans un contexte politique. Si l'intention initiale est louable, la réalisation reste malgré tout trop poussive. Chaque tome est martelé par des considérations politiques (en adéquation avec le ton général de la série) qui prennent, à mon sens, trop d'importance par rapport au reste du récit. [Attention, je ne jette pas la pierre sur le fond de ces considérations mais uniquement sur leur accumulation.] D'ailleurs c'est un sentiment qui m'avait profondément marqué lorsque je lisais ces tomes au moment de leurs sorties ; il m'arrivait, en fin de volume, d'avoir complètement perdu le fil du scénario est de n'avoir retenu que les opinions du tueur.
- 3e cycle : tome 11 à 13 : dans la continuité directe des événements du 2e cycle, cette dernière partie apporte une conclusion qui sert à la fois de prolongement à l'évolution qu'a connu la série mais également de "retour au source". Outre la conclusion élégante, j'ai particulièrement apprécié de retrouver ce bon équilibre entre intrigue et réflexions socio-culturelles propres aux premiers tomes.
En définitive (et en prenant du recul), je pense que les auteurs avaient, d'emblée, une certaine vision de leur série. Car quoi de mieux pour illustrer le cynisme dont fait preuve Le Tueur que de faire évoluer ses cercles d'influences ; débutant dans le milieu underground et finissant dans le milieu politique (en passant par le monde de l'entreprise) ?
Après, certains passages laissent l'impression d'un étirement artificiel. Sans doute le scénariste a t il été un peu trop gourmand en tome ; à moins qu'il ne se soit laissé emporté par ses réflexions au point de perdre un peu le fil du récit. Toutefois, si c'était gênant il y a quelques années, je trouve que ça passe quand même plus facilement lorsque l'on aborde cette saga comme un tout complet. Après tout, rares sont les séries qui réussissent à n'avoir aucun temps mort sur tout leur déroulement.
Concernant le dessin (car il faut bien en parler quand même), c'est beau et c'est propre. Le style reste constant au cours des 16 années qui ont accompagnées la publication du Tueur. De prime abord on pourrait lui reprocher d'être froid et impersonnel, mais quelque part, cela correspond parfaitement avec la vision qu'a le personnage principal sur le monde. Seul raté, l'effet "brisé" que l'on retrouve lors de certains passages et qui donne plus la sensation d'une erreur d'impression que d'une mise en scène volontaire. (Mais bon, sur ce point, chacun se fera sa propre opinion.)
Pour conclure Le Tueur est une série globalement très correcte. Elle n'invente (ou réinvente) rien mais trace dignement son chemin vers les objectifs qu'elle s'est fixée. Et même si quelques détours donnent parfois l'impression que l'on s'égare, rassurez vous, vous finirez quand même par arriver à destination.