Jiro et Kyoko sont un très jeune couple. Il est un jeune dessinateur prometteur, au rythme de travail déstructuré, alternant les nuits blanches et les plages de flemmardise. Il est un peu bourru, naïf, bref jeune. Kyoko est une très jeune femme moderne, qui travaille dans une agence de publicité.


Ils s'aiment et vivent dans un appartement modeste, sans être mariés, ce qui est accepté mais mal vu. Ils sont tout l'un pour l'autre et vivent d'amour et d'eau fraîche. Ils se disputent, partagent des moments ensemble. Ils font l'amour voracement, avec des pulsions sadiques ici et là. Leur monde est petit mais très intense et chaotique.


A l'extérieur de leur vie de couple, on trouve de petits faits souvent inquiétants : un double suicide amoureux, un pervers qui pelote les femmes dans le métro et dont la femme est incestueuse avec leur fils, une jeune cancéreuse mariée à un époux sadique, un enfant tueur d'oiseau, un prêtre pianiste à la main abîmée, un artiste vieillissant suicidaire, une fillette qui pend des chats. Jiro et Kyoko n'en sont pas toujours conscients, tout aborbés dans l'autre qu'ils sont.


Sans qu'il y ait de sexe bestial montré, la sexualité est abordée de manière frontale : règles, foutre, il y a peu de tabous.


Mais surtout, le découpage très nerveux permet de voir ce qui se joue derrière des gestes simples : se suspendre aux poignées du tramway pour faire rire sa compagne, partager une cigarette, préparer le repas, aller acheter un sac de voyage, regarder un feu d'artifice : la manière dont ces gestes sont effectués à deux leur donne un sens. Et en trame de fonds, il y a la conscience que cet équilibre est fragile car il n'est pas validé par l'institution du mariage, que réclame la société, mais aussi la précarité subie, qui n'empêche pas de petits bonheurs incessants. Le motif récurrent des fleurs, s'il peut sembler de prime abord cliché, rappelle cette beauté et cette impernanence. Il y a aussi un côté très zen, les histoires restant parfois inachevées, en se terminant sur un détail incongru de l'environnement, comme un enfant qui lance un planeur miniature sur une plage.


Bref, vous l'aurez compris, j'ai beaucoup aimé cette bande dessinée car elle parle sans complaisance de ce qu'est l'amour fou d'un jeune couple. Et esthétiquement, le graphisme me parle beaucoup, avec ses nombreuses trouvailles. Le premier tome est sans doute le plus foisonnant.

zardoz6704
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le 26 juil. 2020

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