Je ne connaissais pas Pierre-Henry Gomont, je ne sais pas ce qu'il a fait d'autre, mais Malaterre c'est très bien.
Le personnage principal, Gabriel, est une une vraie figure tragique, quelqu'un qui a un rêve, celui de refaire vivre le domaine familial quelque part en Afrique... Seulement il n'en a pas les compétences, et son alcoolisme n'arrange rien.
La BD s'ouvre sur la mort de son héros, une mort peu glorieuse... Une attaque cardiaque... Et tout le but sera de mieux le connaître, de mieux comprendre comment il en est arrivé là, seul, endetté avec un goût prononcé pour l'alcool.
J'aime que ce héros ne se préoccupe que de son rêve, qu'il ne soit pas parfait, pas particulièrement compétent, qu'il n'ait pas réellement de rédemption, il est juste quelqu'un de borné, faillible et mortel. Tout comme nous. Je dois dire que je me suis pas mal reconnu dans le côté très humain du personnage et ceci bien que je ne lui ressemble absolument pas.
C'est la force de savoir écrire un personnage, on arrive à rendre le lecteur empathique envers un type qui est tout sauf quelqu'un de bien.
Et puis mine de rien ses enfants sont également attachants, dans leurs évasions, leurs rencontres... mais surtout ce final, renforçant encore la dimension tragique de leur père. Parce qu'il est question d'héritage, de ce que l'on fait du rêve de nos parents... on le perpétue ? on le met aux oubliettes ? Et ça c'est profondément déchirant, comment on peut, sans vergogne, sans honte, abandonner le rêve de nos aïeux... Comment finalement chaque génération, chaque individu à ses propres préoccupations qui disparaîtront avec nous.
Bref, j'ai trouvé cette histoire d'une justesse absolue dans quasiment tous les thèmes qu'elle aborde. Et si j'ai beaucoup parlé de l'héritage, je dois dire que l'amour naissance du fils est pas mal aussi. En une case, dessinée du point de vue du héros, on comprend tout son désir pour une jeune fille. Il lui regarde la main alors qu'elle est assise à côté de lui. C'est beau.
Et tout ça alors que je ne suis pas forcément amateur de ce style de dessin, mais la richesse thématique, la narration et puis le rythme qui ne redescend jamais dans cette descente aux enfers m'ont passionné.