Dans un futur pas si lointain que cela, la conquête spatiale a permis de passer outre les tensions militaires qui agitaient notre planète. Sauf qu'un meurtre, commis sur un vaisseau explorant les confins des systèmes connus, de personnel pourrait bien se révéler politique et menacer l'équilibre précaire qui règne entre la Terre et sa colonie.


Simon Moore, ancien alcoolique désormais accro aux médocs suite au départ de son épouse Annabelle pour un de ses collègues, et désormais sans travail, fut un temps inspecteur. Il se morfond aujourd’hui dans sa solitude et sa déchéance.


Jusqu’à ce qu’une ancienne connaissance lui propose une enquête de routine, très lucrative, pour sa société. Un enquête au goût de revanche : sur la mort, potentiellement suspecte, de celui qui lui a pris sa femme. Sauf que cette mort a eu lieu dans l’espace et que l’enquête s’avère un véritable huis-clos impliquant les différents membres de l’équipage de l’"Hadrian’s Wall", vaisseau d’exploration spatiale, au nombre desquels figure Annabelle elle-même.


Hadrian’s Wall croise ainsi deux formes de récit de genre : le polar, quasi hard-boiled, et la SF. C’est bien là son principal attrait et, de ce point de vue, la manière dont se déploie l’intrigue et le travail sur l’atmosphère constituent deux réussites. Le huis-clos prend une résonance particulière dans ce cadre intersidéral et se révèle d’autant plus étouffant que les secrets de cet équipage s’avèrent nombreux et les relations entre les personnages crispées pour ne pas dire conflictuelles. Tout cela sans la moindre échappatoire possible...


La source première de tension réside dans le duo posé et aux archétypes auxquels ils empruntent : le privé à la dérive pour Simon, la femme fatale nimbée de mystère pour Annabelle.


Mais ce point de départ se voit rapidement doublé par les passés, forcément problématiques, des autres membres de l’équipage, ainsi que par le contexte politique sous-jacent qui se déploie à travers la trame de science-fiction du récit, à savoir la mission qu’est censée accomplir l’"Hadrian’s Wall".


L’ensemble, bien ficelé, embarque rapidement le lecteur. Si pour le moment l’originalité ne vient pas tant du fil policier ni des relations entre les personnages, le jeu autour des codes repris apparaît suffisamment habile pour emporter le morceau. Le dépaysement vient lui du monde mystérieux, futuriste, de 2085, dans lequel s’inscrit cette enquête, pour une combinaison gagnante. Intrigant à souhait et posé pas à pas par les deux scénaristes Kyle Higgins et Alec Siegel, il devient un terrain d’exploration en soi.


Reste le dessin de Rod Reiss, raide et statique, qui ne nous séduit guère, de même que les couleurs, froides et numériques. Pour une visée presque trop léchée, ou clinique, qui convient certes bien au cadre décrit, mais tient à distance. À nos yeux, les planches gagnent réellement en intérêt et en intensité dès lors que le crayonné se rend visible et le trait plus embrouillé.


L’édition, dont Glénat est directement partie prenante, se voit complétée par des études de personnages et costumes, des planches à différents états de réalisation et surtout une intéressante interview des deux scénaristes. Le volume s’achève en outre sur un développement réellement inattendu qui donne une réelle envie de découvrir la suite de cette aventure aux confins de la galaxie.


Chronique originale et illustrée sur ActuaBD.com

seleniel
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le 27 nov. 2016

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