Naruto
6.7
Naruto

Manga de Masashi Kishimoto (1999)

Naruto, Ô Naruto!! Pourquoi es-tu Naruto!!??

Naruto c’est l’histoire de Naruto, apprenti ninja turbulent et mal aimé ayant comme but de devenir Hokage, le chef du village de Konoha, afin d’être respecté.

Le petit plus de ce héro est que dans son ventre réside Kyûbi, le plus puissant des démons ayant attaqué le village il y a 15 ans.
Le petit moins de ce héro c’est qu’il est passablement nul… et chiant… je l’aime pas

Le gosse est intégré dans l’archétype du trio : Naruto est ingénieux et marrant, Sasuke ténébreux et talentueux, et Sakura, c’est la nana infirmière (ça reste un shônen japonais, laissons leur leurs fantasmes). Le tout est chapeauté par Kakashi, un sensei mystérieux possédant une pupille spéciale. Ensemble ils vont remplir des missions de bas niveau jusqu’à une première grande histoire (arc) où ils vont affronter Zabuza, un ninja déserteur à l’épée surdimensionnée et son acolyte Haku, un androgyne aux pouvoirs héréditaires.

S’ensuit des tests pour passer au grade supérieur qui vont se finir en tentative de destruction du village par le premier grand méchant d’une grande série de grands méchants : Orochimaru. Apparait également une mystérieuse organisation criminelle qui cherche les démons, une recherche de puissance éhontée, la surmultiplication de personnages secondaires sans charisme ayant la fâcheuse tendance à ne pas vouloir mourir et une grande guerre mondiale opposant les tout gentils et les tout méchants qui le sont toujours pour une bonne raison.
Le tout s’approchant à peine d’une conclusion.

Kishimoto créée un monde relativement logique au début. Les missions de ninja sont divisées par classes et rémunérées. En fait, on ne s’éloigne pas de notre société car les ninjas agissent plus comme des coursiers, bien qu’ils s’inscrivent dans la mémoire collective du Japon comme l’armée impériale avec un shogun à sa tête.

Le personnage central se démarque par son dynamisme et son décalage mais ça passe. Faut dire que la traduction de Naruto Uzumaki, ça donne quelque chose du genre « le tourbillon tourbillonnant », donc c’est normal qu’il foute un peu la merde.
Notons juste que le village de Konoha est censé être caché au pied du mont Rushmore des ninjas. Dans le genre discret, je pense qu’on peut faire mieux.

Sasuke prend plus d’envergure car il est moins débile que Naruto, il poursuit un objectif concret et il est présenté comme le dernier de son clan, ce qui est plutôt classe dans le genre. En fait Sasuke est le seul des trois à avoir ce coté mystérieux qui lui donne une personnalité, mais tout est gâché par le sur-jeu qui lui est attribué. Au final, on a le droit à plusieurs passage où le manga pourrait être rebaptiser Sasuke, tandis que les personnages secondaires, nécessaires pour donner du relief à une intrigue de cette ampleur, sont très, très, très souvent laissé de coté et sous-exploité pour devenir des caricatures d’eux-mêmes et s’empilent en un gros tas sur le bord de l’intrigue, attendant leur moment de gloire.

A quoi reconnait-on une bonne série ? A ses méchants ! Et il faut bien reconnaitre qu’il y en a des pelletés ici, et de tous les genres : un fétichiste des serpents, un gamin qui fait des pâtés de sable, un pacifiste éradicateur de clan, un mec immortel et son comparse collectionneur de cœur, un fanatique des poupées Barbie, bref….

Mais en même temps, Kishimoto cherche toujours à justifier les actes de ses personnages, et on en arrive à un constat paradoxal : Tous les méchants ont une raison de ne pas être gentils !

Orochimaru est devenu malfaisant à force de vouloir l’immortalité suite au décès de ses parents qui l’a traumatisé. Traumatisme qui influence également Sasori le marionnettiste. Gaara à le double facteur démon et tentative de meurtre de la part de sa famille, tandis qu’Itachi a tué son clan pour le bien de son village. Pain veut détruire le monde pour éviter les souffrances de la guerre, ce qui n’est pas paradoxal du tout… Même les démons se révèlent être des petites créatures incomprises que les humains utilisent pour se battre !! Des Pokémon, quoi.

Pourquoi ne peut on avoir un méchant qui poursuit un objectif à lui, qui veut détruire le monde juste parce qu’il le peut ?! Il faut arrêter de faire croire aux lecteurs qu’on est méchant par traumatisme.

Ce manga s’inscrit dans un style shônen. Mais qu’est-ce qu’un shônen ? On pourrait dire que le shônen est un style de manga avec une histoire simple et violente prônant des valeurs de bonté et de justice. Et bien non. Le shônen, traduire « adolescent », représente en réalité une cible marketing dans le domaine du manga. Un shônen est donc un manga qui se destine aux jeunes garçons. Le genre auquel il ne faut pas le confondre est le Nekketsu ,« sang bouillant », et rassemble plusieurs caractéristiques comme le rêve du héro, souvent sans famille, avec des capacités hors-normes et qui lutte contre le mal en se trouvant des compagnons. Très souvent ses premiers ennemis deviennent ses amis. Notons parmi les plus notables ici Neji Hyuga et Gaara. On s’attend à des entrainements et une montée progressive en puissance face à des adversaires de plus en plus puissants, le phénomène du Power-up largement usité chez le Dragon Ball de Toriyama. Le récit de Naruto s’inscrit dans ce cadre shônen/nekketsu, sauf que la montée en puissance est ici exagérée, on y a droit constamment, et à force de tirer sur la corde, on ne réagit plus. Pas étonnant qu’on ait affaire à d’énormes incohérences comme un mec immortel, des explosions en rafale qui peuvent détruire un pays entier provenant de mecs sensés être discrets, où des personnages aux couleurs criardes qui piquent les yeux alors que le manga est en noir et blanc.

En plus, cette recherche de puissance sans fin qui ne peut théoriquement pas coller au monde des ninjas. Un ninja, où shinobi, est un guerrier-espion que l’on attribue au Japon féodal. Le côté espion montre bien que les ninjas sont des experts en dissimulation, en empoisonnement, en diversion, furtivité,… Pour Kishimoto, les ninjas ont d’avantage la connotation du combattant utilisant les techniques de ninjustsu, « techniques ninjas ». Mais là, le côté le plus sombre des ninjas est totalement occulté, au bout de quelques tomes, les personnages ne tentent même plus d’être discrets, et se balade par brochette de 12.

Naruto est publié au Japon dans le Weekly Shônen Jump, magazine hebdomadaire de shônen depuis 1999, 62 tomes en France et 68 au Japon pour un total de 597 chapitres en France et 633 au Japon… Et ça vient juste de finir au Japon avec un total de 700 chapitres… Cela signifie que le public de Naruto a pris entre 12 et 15 ans dans la face. Les lecteurs de la première heure ont grandi et se trouvent désormais en décalage avec la cible du manga, qui veut toujours les mêmes choses : de gros combats et d’énormes techniques au point qu’on a le droit à une quatrième guerre des ninjas qui ressemble à un fan-service. On nous présente un passage de flambeau entre générations et des guerriers légendaires aux techniques légendaires sortis du cul d’un démon.

Sur le papier c’est louable mais quand cela dure, tous les rebondissements deviennent aussi prévisibles qu’un épisode de Derrick. Kishimoto s’est peut-être trop laissé imprégné des idées de ses fans, ce qui mène à une surenchère qui nuit à la trame de fond et marque une rupture de ton entre la manière dont l’auteur envisageait son travail et la manière dont il est obligé de le réaliser.

Finalement, ce qui dégoutte le plus dans Naruto, c’est sans doute l’effet de surenchère qui est venu se poser sur de très bonnes intentions elles-mêmes un peu bancales. En plus, quand on grandi avec ce genre d’œuvre, on se rend compte à la fois de ses défauts de base, mais aussi de ses limites, qui sont ici largement dépassées. Naruto ce sont de bons souvenirs qui laissent un goût amer dans la bouche.

Créée

le 20 déc. 2014

Critique lue 1.9K fois

8 j'aime

Spider-Jojo

Écrit par

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8

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