Ecrire un scénario qui plaise à quelqu'un d'autre que sa grand-mère (qui a accroché nos premiers gribouillages sur le frigo, ne l'oublions pas), ce n'est jamais simple. Marcher sur les pas de quelqu'un d'autre, dépoussiérer les idées d'un auteur qui impose un grand respect, c'est probablement un exercice plus difficile encore.
Xavier Dorison est maintenant devenu un auteur phare dans la bande dessinée franco-belge: "Le maître d'armes", "Le troisième testament", "Undertaker", etc...autant de créations qui valent le détour.
Je découvre maintenant qu'il excelle également dans ce travail de réécriture (spin-off peut-être plutôt ?) avec la saga en 4 tomes "Long John Silver". Je viens de dévorer les deux premiers tomes. On retrouve un des pirates les plus célèbres de la littérature. Dans les pas de Stevenson, on a vu un peu tout et n'importe quoi, mais là, le personnage est en accord avec ce qu'à voulu en faire son créateur: effrayant, sombre, hors la loi mais guidé par des valeurs (de pirates...mais quand même), on retrouve toute cette ambiance avec plaisir. En bon récit de piraterie, il est question de trésor (ah bon ?) de trahison, d'amour, de combats, de naufrages, de terres inconnues. C'est fluide, il n'y a pas vraiment de longueur dans la trame, et pourtant l'écriture reste très littéraire. Vous retrouverez tout ce qui fait la "patte Dorison" : voix off que l'on imagine grave, roulement de tambour, dialogues cyniques...le souffle épique est là.
Au dessin, Mathieu Lauffray signe un album dont le trait réaliste et les couleurs sombres portent bien le scénario. Ce que j'ai trouvé assez original, c'est le choix de la mise en page, où il y a alternance de planche typiquement franco-belge (fond blanc et succession de cases avec différents plans et dialogues), de plans en pleines pages, sortes de montages graphiques qui exposent les souvenirs racontés par la voix-off, et enfin, lors des combats souvent, des cases sur fond noir, qui relèvent plus d'une présentation type comics de chez DC...le tout est cohérent, et il fallait oser. Je le redis...un souffle épique prenant.
Si vous appréciez les histoires de pirates et d'aventures sur mers et océans, je vous conseille cette saga (bien partie, je ne m'engage pas sur la fin). J'en profite aussi pour faire de la pub : dans les réécritures de Stevenson, lisez également le "Jim Hawkins" de Sébastien Vastra qui a anthropomorphisé le célèbre aubergiste devenu chasseur de trésor pour en faire un jeune lion attachant. La couverture de l'album donnant une idée d'à qu'elle point le dessin est à tomber parterre.
Bref. Si ça ça n'en jette pas, moi, je ne sais plus.
"Il est l'enfant de l'encre et de la plume,
La figure de proue de "l'île au trésor" de R.L. Stevenson.
Il a vécu de crimes et de rêves, connu les galions de madère, le sac de Maracaibo et les révoltes des boucaniers.
Il va mêler l'or et le sang pour sceller son destin aux confins des royaumes perdus de l'amazonie.
Il est le dernier pirate.
Il est la légende.
Long John Silver"