Après s'être attaché à la fin de vie, Nicolas Vadot revient, avec Neuf Mois, évoquer la naissance et ses perturbations à travers les interrogations de Colin, futur père face aux angoisses de ses incapacités.
La narration se veut poétique,
entre le poids du quotidien et d'oniriques échappées nocturnes aux élans psychologiques. Et si les ambiances sont marquées, le dessin n'a malheureusement pas la puissance désirée.
Depuis que son amie est enceinte de leur premier enfant, Colin, la trentaine tassée, fuit chaque nuit la réalité pour s'évader auprès du Marchand de Sable et de son épouse, psychologue attentionnée, dans un univers de silice et dans les profondeurs océanes de son inconscient. Le postulat est sympathique,
malheureusement le traitement en est léger
et trop décousu pour lier le propos : un chaton pour l'enfant à venir, une mouche pour les errances aveugles et un imposant et menaçant requin pour les angoisses, à trop plomber les symboles, la narration s'égare dans les rêves éveillés du personnage sans jamais réussir à centrer clairement son discours. L'auteur se perd tristement en circonvolutions pour finir par ne rien dire.
Graphiquement, Nicolas Vadot n'a ni la finesse ni l'ampleur de ces artistes qui croquent la réalité avec une vision, qu'elle soit grandiloquente ou réduite d'expressivité pure en trois coups de crayons : l'homme s'applique, le soin apporté aux planches est (bien trop) visible, mais
le résultat manque de relief autant que de charme.
Il reste le plaisir des influences, ce trio de Sigmund Freud et ce clin d'œil appuyé à Salvador Dali où une caravane de chameaux aux longues jambes élancées rappelle les éléphants du peintre espagnol.
De belles choses, agréables tentatives graphiques et soupçons de poésie, ne suffisent pas à poser ce récit en œuvre mémorable, il manque le liant, le ciment de l'implication, ce qui kidnappe le lecteur en une aventure qui l'échappe de la morosité. Nicolas Vadot explore
une forme de narration néo-réaliste teintée de questionnements philo-psychologiques
sans jamais creuser suffisamment pour totalement embarquer son lecteur au cœur de l'émotion.
Et ces Neuf Mois filent en un instant sans même effleurer ce qu'ils sont supposés remuer.