Les dures réalités de la vie d'un homme ordinaire pas si ordinaire qu'il en a l'air
Déjà, ça commence mal pour Hervé Boileau, personnage principal de l'histoire, je n'ose dire héros, qui vient juste de pisser sur ses chaussures. Faut qu'il limite les dégâts, pour ne pas passer pour un porc, d'autant plus que c'est un véritable obsédé de l'hygiène aux toilettes. Premier moment de solitude... Il va y en avoir d'autres. Et ce n'est pas l'eau qu'il va boire, mais la tasse entière !
La couverture de l'album résume bien ce qui se passe : pour des raisons inconnues, tout le monde peut désormais voir, entendre, sentir, ce que voit, entend, sent Hervé Boileau, ce qui est une excellent idée de départ, le problème est qu'elle n'est pas assez exploitée.
Hervé Boileau, qui est un gars normal, un con diront certains, en tout cas un humain bien imparfait, sans répartie, et avec ses moments de faiblesse, se retrouve donc dans une situation peu agréable, voire inextricable, contraint de partager son intimité avec le reste de l'humanité. L'enfer c'est les autres. Boileau n'a pas besoin de Sartre pour le comprendre !
Tout le monde le recherche ou se l'arrache, mais seulement pour tirer profit de ce qui lui arrive, de ce qu'on ne peut qualifier de don puisque ce sont tous les autres qui le détiennent ! On l'utilise alors pour faire passer des messages, qui à sa famille, qui à son patron, qui à d'éventuels clients. Il tente de fuir mais ça n'est pas si simple, puisque tout le monde voyant ce qu'il voit, chacun sait où il va s'il garde les yeux ouverts... Il est alors littéralement instrumentalisé par les autres, notamment sa petite amie, mais aussi ses potes un peu crétins qui lui proposent leur aide mais cherchent en réalité à gagner des thunes sur son dos.
On est dans le domaine du fantastique, l'idée de départ est excellente, mais je trouve au final que Trondheim n'en exploite qu'une toute petite partie des possibilités. Une grande partie de l'album est juste une sorte de traque sans grand intérêt. L'ultime fin est pas mal, mais Trondheim n'a pour moi fait qu'effleurer le sujet. Peut-être que la bd n'est pas le meilleur support pour traiter le thème, qui pourrait faire un très bon film, mais tout de même ! Si certaines situations sont assez drôles, je trouve donc l'ensemble assez moyen, réellement décevant au vu des possibilités laissées de côté par le scenario. De surcroît, si le choix du bleu s'ajoutant au noir et blanc convient plutôt bien, les dessins de Matthieu Bonhomme ne m'ont pas particulièrement plu, laissant avant tout une impression de froideur.
Bref, un bilan pour moi plus que mitigé.